2021. Lettre de Pâques 2/2

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« Le Seigneur entend ceux qui l’appellent : de toutes leurs angoisses, Il les délivre.»

 

1       Peut-on revenir au débat ? La question récurrente de l’euthanasie…

            La démocratie implique une éthique du dialogue où, à travers une argumentation et une réflexion menée ensemble, une prise de décision se fait. Or, il faut le remarquer avec la question de l’euthanasie, s’il y a eu un débat avec des positions et un long processus de réflexion, il y a eu aussi une décision prise pour défendre ce genre de pratique calamiteuse, tout droit venue d’une culture de mort et semant désespérance et effroi. Revenir à chaque fois de manière entêtée sur le sujet devient alors une forme de tyrannie idéologique pour imposer sa pensée, en dehors de tout respect dans la relation. Celà étant dit, parlant d’euthanasie, faut-il s’étonner que la relation soit malmenée, voire mortifère ? « Tout semble se passer dans le plus ferme respect de la légalité, au moins lorsque les lois qui permettent l’avortement ou l’euthanasie sont votées selon les règles prétendument démocratiques. En réalité, nous ne sommes qu’en face d’une tragique apparence de légalité et l’idéal démocratique, qui n’est tel que s’il reconnaît et protège la dignité de toute personne humaine, est trahi dans ses fondements mêmes : « Comment peut-on parler encore de la dignité de toute personne humaine lorsqu’on se permet de tuer les plus faibles et les plus innocentes ? »[i]

 

Revenir sur le débat est une vraie question de sens et de l’inter-dit (ce qui est dit entre nous). Certes, il peut y avoir des compréhensions erronées ou des prises de positions non ajustées aux réalités. Néanmoins on peut aujourd’hui s’interroger sur l’éthique du dialogue et la volonté de construire en commun dans la répétition véhémente de prises de position toujours contestées afin de vouloir faire changer les mentalités, pour une régression sociétale problématique de notre point de vue dans la foi, et en tout cas, d’un grave clivage social tant cela heurte la conviction du sens de notre humanité et l’impératif d’honorer la personne dans le respect de sa vie. Dans une recherche du lien, comment peut-on défendre la rupture du lien, sans être en infidélité avec la vie ? « L’horizon de la mort s’ouvre devant l’homme en même temps que la révélation de la signification procréatrice du corps »[ii] Une logique de la connaissance, où chacun est ouvert à une meilleure connaissance dans la fécondité de la relation et non dans l’instantanéité des situations de vie. « L’horizon de la mort s’étend sur toute la perspective de la vie humaine sur terre, une vie qui a été insérée dans ce cycle biblique originel de la « connaissance-procréation »[iii]. Réfléchir sur la mort, c’est donc réfléchir sur le temps et l’espace de la rencontre, et non la fermeture d’une relation.  

 

Ainsi la fidélité, même malmenée dans une société en perte de repères, reste une valeur source de la cohésion humaine qui s’inscrit dans le cycle du temps et la perspective de nos limites humaines. Grandir, et se développer dans son humanité, se fait d’abord et avant tout dans la fidélité à la Parole et aux actions qui permettent l’émergence d’une confiance et d’une paix intérieure. Si la question de la mort ne peut être évacuée dans l’accompagnement des souffrants, elle ne doit pas non plus être bradée dans un engagement pour une fin abrégée.

 

1.1                L’instrumentalisation des sens

 

La question de la fin de vie et de la souffrance que cela peut générer ne peut être réduite à une affaire de sensibilité, ni même de capacité de réfléchir à la place de la personne pour gérer ses propres émotions. Le cas Lambert était symptomatique d’une décision prise par des tiers qui ne peut que questionner, quand bien même la personne avait, dans un moment donné, indiqué des souhaits dans un contexte de pleine jouissance de ses facultés et sans l’expérience pratique de la situation de fin de vie. « Là où l’homme, par sa connaissance théorique ou pratique… tombe dans l’abîme de son existence qui seul donne à toute chose son fondement, là où cet homme a encore le courage de jeter un regard en lui-même et de trouver dans sa profondeur sa vérité dernière, c’est là aussi qu’il peut faire l’expérience de ce que cet abime l’accueille comme un abri de vérité et de pardon, lui concédant légitimation et courage pour qu’il accorde foi à ce que l’interprétation de cette expérience par l’histoire du salut et de la révélation qui concerne l’humanité… est l’ultime profondeur, l’ultime vérité justement de cette expérience apparemment si banale. »[iv] La valeur de l’amour rappelle le sens de la mort. Accueillir sa profondeur d’être c’est reconnaître le sens de la vie et la vérité de tout notre être dans son intégralité et son unité. Nous ne pouvons pas faire des lois sous le coup de l’émotion, même si c’est souvent le cas, reconnaissons-le. Sinon on risque de tomber dans la « plouc-ocratie », néologisme d’une décision hors de la vérité et de la raison pour se situer uniquement dans l’émotion sans intelligence d’un non-savoir-être jumelé à un non-savoir-vivre. Se positionner sur les références humaines, lorsqu’elles touchent à la raison et à la vérité peut être une bonne chose mais, lorsqu’elle est détournée par l’émotion et le ressenti, elle peut devenir vite tyrannique.

 

La loi de Dieu et les commandements qu’Il nous donne, organisés par l’amour et non la rigidité de la norme, aident à choisir en homme libre ce qui nous conduit vers le meilleur bien. « Ceux qui vivent selon la chair désirent ce qui est charnel ; ceux qui vivent selon l’Esprit ce qui est spirituel. Car le désir de la chair c’est la mort, tandis que le désir de l’Esprit c’est la vie et la paix, puisque le désir de la chair est inimitié contre Dieu : il ne se soumet pas à la loi de Dieu, il ne le peut même pas, et ceux qui sont dans la chair ne peuvent plaire à Dieu. »[v] La loi de Dieu est structurante dans l’amour, parce qu’elle travaille l’autonomie de l’homme et sa libre expression dans la réalité de sa condition humaine. Mettre Dieu en dehors du champ de nos investigations et de nos choix de société, c’est un peu comme le Titanic naviguant sans radar et prenant le chemin du Nord pour aller plus vite. Certes la vitesse a été là, mais le naufrage aussi et tout aussi rapide dans cette course du temps sans fin. Cette course vers la mort que nous essayons par tous les moyens de légiférer pour, dit-on, éviter la souffrance sera un naufrage civilisationnel, n’en doutons pas. Les pays qui l’expérimentent sont en effet ceux où les taux de suicide et les angoisses sont les plus prégnant. Nul ne peut définir la valeur de la vie et se croire tout-puissant pour tenir en main sa propre histoire. C’est vouloir être Dieu, un nouveau paternalisme terrestre qui se révèle idolâtre et destructeur, tel un dieu Mardouk brûlant dans la fièvre ceux que l’on aura définis comme souffrants et dont la vie sera jugée insignifiante, touchant plus particulièrement non plus les ainés comme d’antan, mais les marginaux et ceux qui se retrouvent sans famille ou hors réseaux sociaux.

 

Cela étant dit, il ne faut pas non plus laisser les soignants seuls s’interroger sur la souffrance du malade et la juste distance. « Il est clair que les comportements des soignants et accompagnants face au malade souffrant obéissent à des motivations complexes en partie conscientes, en partie inconscientes…Tant dans le domaine de l’écoute et de l’évaluation de la douleur que dans celui de son traitement, les partenaires de la relation doivent conquérir une authenticité qui est libération de la peur et de l’emprise du sentiment d’impuissance. »[vi] Or, la récurrence du débat sociétal est bien dans cette peur irrationnelle face à celui qui souffre, et ce sentiment violent d’impuissance dans un monde que nous voulons de plus en plus planifier et programmer, l’aide numérique étant importante dans ce domaine. Mais tout ne peut pas se réduire à des réponses binaires, ni même à une intelligence artificielle. Or l’accompagnement de la fin de vie est bien du ressort des ressources humaines et de la relation faite d’empathie, de compassion et de présence vivifiante.

 

Le paternalisme émotionnel, prônant la mort pour le bien des enfants de la patrie, est un des tyrans de la culture de mort et d’une civilisation de la désespérance et de l’angoisse. C’est d’ailleurs dans cette forme de déni de la vérité, que l’on transforme le langage pour ne pas aborder le vrai problème. Ainsi le suicide assisté[vii] prendra le doux nom « d’assistance médicalisée active à mourir ». Bienvenue mélancolique de tout bord dans ce nouvel eldorado de la fuite en avant, pour cacher cette souffrance insupportable et dans un refus d’un accompagnement adapté. On pourrait en déduire la maxime suivante, « être plus humain dans des relations déshumanisés. »

 

La question de criminaliser la fonction médicale, en autorisant l’euthanasie est un dévoiement de la profession, une violence de la conscience et un rapport à l’autre qui s’ancre dans le soupçon. Le monde kafkaïen de l’absurdité s’étend aux soins. Ôter la vie avec préméditation est un assassinat[viii], forme grave du crime, qu’importe d’ailleurs que cela soit légiféré ou pas, l’acte en lui-même est un crime, non parce qu’il y a une définition légale, mais parce qu’il revient à tuer Abel dans sa faiblesse et dans une rupture de fraternité. Nous ne pouvons pas dévoyer les mots, pour appeler cela mort naturelle, juste par compassion. Donner la mort, est toujours un acte surnaturel, qui traitait les assassins dans la société romaine comme des parias, les excluant de la société. Un corps professionnel provoquant la mort, serait donc une profession de parias, tels que les bourreaux au Moyen-Âge. La défiance quant à l’acte médical deviendrait totale et engendrerait une grave judiciarisation des actes, entraînant la société dans un clivage de plus en plus fort sur le respect de la vie et de la dignité de tout homme à exprimer ce qu’il est dans toutes les conditions, et non seulement celles que l’on tolère ou qui disent nos manques .La conscience droite devra conduire les croyants à respecter le nom de Dieu posé en chaque personne et à refuser tout ce qui va à l’encontre de l’évangile de la vie. Jésus a vaincu la mort, une fois pour toutes, ce n’est pas pour nous y enfoncer sans rémission. Le sentimentalisme n’est pas raison, nous devons rechercher ce qui fait sens et non nous apitoyer sur nos sens !

1.2                Dépasser les incompréhensions pour un débat apaisé

            Le débat a pourtant bien montré qu’il fallait faire une différence entre l’acharnement thérapeutique, à décourager, et l’euthanasie qui est une aide active à donner la mort. Les discussions fondées sur des études sérieuses, ont permis de montrer qu’un accompagnement adaptée permettait d’aider la personne à vivre dignement et à refuser d’accélérer le processus de sa mort. Des statistiques établies sur plusieurs années ont prouvé que le positionnement face à la mort changeait selon qu’on était concerné ou pas, et qu’au fil du temps les promoteurs de l’euthanasie en devenaient les opposants. Bref, cela a été mis à la question, voté, étudié de nombreuses fois, au prix d’une réflexion d’ensemble approfondie, et la sage décision a été de refuser une telle mesure. Et nous voici encore en débat quelques dizaines de mois après. Respecter le choix, ce n’est pas le remettre toujours en question, lorsque cela ne va pas dans le sens d’une idéologie portée par un petit nombre, certes aux moyens disproportionnés, mais ne représentant en aucun cas la société ni ce qui a été le fondement de notre culture depuis Clovis.

 

            Il nous faut aussi réfléchir sur la capacité à donner la mort et, dans une connaissance de plus en plus complexe des produits, et avoir une technique efficace qui ne correspond plus aux soins (mais à l’accompagnement). Même si là encore il faut discerner ce qui est de l’intentionnalité et de l’acte. Soulager la souffrance en augmentant les doses de morphine est une chose, même si l’on dépasse trois ou quatre fois la dose létale, et tout en sachant le risque d’O.A.P. (Œdème aigu pulmonaire entraînant la mort) pour la personne. lorsqu’on augmente la dose pour soulager de la souffrance. Nous ne pouvons pas parler d’acte euthanasique lorsqu’il résulte d’un soin et d’une pratique pour soulager la douleur avec un risque de mort, non recherché pour lui-même mais comme une possible conséquence. C’est pourquoi on ne peut pas non plus réduire certains actes à de l’euthanasie, ou prendre d’autres actes, malgré leur intentionnalité comme des soins. Le débat apaisé ne peut se faire dans l’ignorance, ni dans une mauvaise foi ou une mauvaise interprétation des actes. « Mais qui va dire qu’une souffrance psychique est in-sup-portable et que la personne est bien libre, éclairée et réfléchie ? Les médecins, les patients, les deux ensemble ? Un logiciel d’intelligence artificielle, un « insupportablomètre » capable de mettre tout le monde d’accord ? »[ix]. N’aggravons pas nos différences d’appréciation par des différences de traitement qui rendent la science médicale translucide, c’est-à-dire incapable de direction, laissant la tyrannie des idéologies l’emporter sur ce qui fait l’homme et sa dignité propre d’image de Dieu. Ce refus de soin pour donner la mort ne peut être un accompagnement à la fin de vie, mais participe à une culture de mort vers la déchirure de l’être par l’aliénation de sa décision enfermante.

 

1.3                Rediscuter sans arguments nouveaux

            En fait remettre sur le tapis la décision, prise en conscience et avec sagesse, n’interroge pas sur la déconstruction de la parole[x], puisqu’il est indigne d’accéder à la volonté de mourir[xi] et que nous avons mené déjà une réflexion là-dessus, qui n’a aucun nouvel élément pour étayer l’inverse. C’est bien là le problème, revenir sur des discussions qui ont abouti à un consensus et une prise de décision, sans apporter de nouvelle approche, ni même un approfondissement de réflexion, mais dans un travail de sape pour obtenir un choix contre nature. Il s’agit bien d’une déconstruction de l’autorité, qui sans cesse essaye de pousser les limites, non sans une certaine arrogance dans un agenda surprenant.

 

C’est ainsi qu’en pleine pandémie, alors que les soignants se battent dans les salles de réanimation pour ramener à la vie ceux qui sont sur le départ, d’autres, pour des motifs dits idéologiques (mais n’y a-t-il pas du cynisme derrière, poussant pour l’arrêt des soins ?), militent pour supprimer la vie humaine, résultant d’un choix plus ou moins libre, d’ailleurs. La question de la liberté face à l’euthanasie mérite très clairement d’être posée. Il suffit de voir comment se passent les demandes d’avortements et les contraintes exercées (d’où l’appellation “avortement sous contrainte”), pour être vigilants dans tous les domaines.

 

Cette manipulation des bons sentiments se révèle en fait une tyrannie de la pensée unique et la volonté d’asservir, quoi qu’il en coûte, les consciences par tous les moyens, sans même respecter le système démocratique d’une parole donnée. De plus, l’instrumentalisation des situations et l’abrutissement du tapage médiatique semblent rendre respectable ce qui va à l’encontre de la dignité humaine. Je ne parlerai pas des films et autres émissions qui essayent de rendre la notion respectable, en mettant en scène des situations dans une instrumentalisation honteuse de la pensée.

 

Toutefois la conscience de chacun est encore assez bien formée pour y opposer un rejet de principe et de raison. La loi naturelle garde toute sa vigueur pour être utilisée au nom même de la raison humaine, avant d’aborder la loi de Dieu et l’aspect religieux. Il est important de rappeler que c’est au nom même de notre humanité et du respect de la personne, que nous protégeons la vie et que nous essayons de lui donner toute son ampleur, sans occulter d’aspect par facilité ou émotion mal placées. Or la conscience de chacun va toujours rechercher une meilleure humanité, quand bien même elle est ensuite amenée sur d’autres valeurs en perte de sens. « Quelle serait la dignité de tout être humain si personne ne pouvait et ne voulait signifier ce qu’il est et ce qu’il faut à l’homme plongé dans la nuit de l’esprit ou dans la désolation du malheur ? Ce qu’il est et ce qu’il vaut n’est jamais réductible à une partie de son être ou de sa vie ; l’être humain est indivisible. »[xii] L’écologie intégrale est bien cette vision de l’homme dans toutes ses relations et dans l’unité de son histoire, et non à partir d’une situation, même si elle apparait inextricable. Nous comprenons alors que l’enjeu aujourd’hui est de vouloir faire des cibles de ceux qui connaissent des difficultés à vivre. Des autorisations à abattre, à travers des idiots utiles, et un cynisme économique de rationalité. D’ailleurs, la réduction du nombre des lits d’hôpitaux et notamment des lits de réanimation n’entre-t-elle pas dans cette optique que la vie à un coût trop élevé pour le budget de l’État ? On peut s’interroger sur le silence, avant la crise sanitaire, pesant sur les réductions sur le soin, ou le transfert de charge, dans une enveloppe fermée, comme rembourser la PMA sans changer le budget de la sécurité sociale, c’est-à-dire un déremboursement d’autres prestations, ce qui peut être problématique. Cela ne fait pas assez de bruit pour être audible dans l’amphithéâtre démocratique !

 

            Certes, l’idéologie de l’euthanasie est souvent remise dans les programmes politiques par des forces obscures d’un petit groupe d’irréductibles ayatollahs prêts à tout afin de faire avancer une cause, même si on s’interroge sur le dessein clairement recherché. Il y a quand même un moment où il faut savoir dire stop à ces propositions qui vont toujours dans le même sens, déni du sacré de la vie et nihilisme aboutissant à ne plus voir la volonté inscrite dans le temps, mais dépendant d’un choix du moment, autrement dit de la circonstance. Rien de nouveau donc, quant aux arguments, mais seulement la recherche de donner de la voix en jouant sur l’émotionnel et le relationnel, dans les cercles de pouvoir et d’influence. Il nous faut cultiver l’audace de l’indignation afin de refuser la forme idolâtrique de s’adonner à des désirs.

 

1.4                Réfléchir avant de n’être que dans l’émotionnel et renouer le lien fraternel

            Je reconnais qu’il est difficile de réfléchir posément sur le sujet, tant l’émotionnel prend le pas sur la raison et que l’instrumentalisation des idéologies, loin de souder une société, la fracture un peu plus. Faire le choix de la mort, c’est faire le choix de la rupture du bien commun. Parfois il faut rappeler de manière radicale l’enjeu car revenir comme un bélier, pour faire céder la porte, devient une violence intolérable. Je sais bien que la bêtise humaine, accouplée à la lâcheté politique, fera qu’un jour les digues de la conscience cesseront de protéger l’humanité. Sauf si, par un sursaut du bien social, on en venait à criminaliser ce genre de démarche, ce qui pour le coup serait une vraie avancée sociétale : un délit d’entrave à la vie qui mettrait hors la loi tout autre courant. Mais, là encore, ne serions-nous pas dans une autre forme de tyrannie développant une législation à outrance de ce que l’on peut dire ou pas dire ? C’est d’ailleurs la problématique que propose le délit d’entrave à l’avortement voté par un gouvernement en perte de repères. 

 

En tout cas, il nous faut rappeler la valeur sacrée de la vie au nom même de la fraternité républicaine ! Dans la foi, nous, croyants, savons que c’est Dieu qui est source de toute vie et que de Lui vient toute possibilité. Vouloir attenter à la vie, c’est donc se faire comme des dieux et blesser notre vocation d’homme-image de Dieu. Notre nature reste pour nous catholiques inaltérable, mais l’inclination du péché originel vient de cette attirance sur l’immortalité et la mort. Nous ne sommes plus à un paradoxe près. Pour tout fidèle du Christ il ne peut pas y avoir de compromis avec ce courant de pensée qui est d’abord et avant tout une rupture de la fraternité.

 

« O mort où est ta victoire ? » nous interroge saint Paul, pour nous rappeler que l’amour de Dieu est de toujours et la mort vaincue par la résurrection. Si aujourd’hui les parlementaires refusent encore de légiférer pour permettre une telle aliénation, la problématique posée n’est pas en termes de victoire ou de défaite, mais de questionnement sur le fait de revenir à la charge de manière intempestive sur un positionnement qui a déjà été donné, et sans autres considérations à aborder. Une fois que les définitions de l’acharnement thérapeutique et l’euthanasie ont été bien cadrées, que l’accompagnement de la souffrance est vu différemment de l’accompagnement de la douleur et que l’exercice d’un prendre soin a été réfléchi dans l’environnement d’une humanité intégrale, je ne vois pas pourquoi aborder à nouveau le sujet, sans élément nouveau, sauf à vouloir faire violence. Une fois que l’on dit non, c’est non, comme nous le disons dans d’autres domaines. Soyons clair, le fait de remettre le sujet sur le tapis est déjà une victoire pour la culture de mort. Et l’incapacité d’un positionnement ferme en promouvant certaines valeurs, est une faillite de notre pacte social et de la recherche du bien commun. Car « ça bloque avec la fraternité de la République »[xiii].

 

La première fracture de l’euthanasie est la fraternité comme l’a justement rappelé le moraliste Bruno Saintôt. Elle fait écho à la Parole « Qu’as-tu fait de ton frère ? » lorsqu’on voudrait administrer la mort. Quelle peut être la conception de la finitude lorsqu’on veut achever la personne et être au pouvoir pour diriger dans la toute-puissance de son acte, le destin à accomplir ? « Les propositions de loi défendent la liberté et l’égalité, c’est bien. Pourtant ces deux références ne forment pas les deux tiers de la devise de la République ou les deux pieds d’un tabouret. Sans la fraternité, tout ça ne tient pas. C’est plus que bancal. La liberté et l’égalité ne peuvent être ni effectives ni viables. … La fraternité, elle, fait converger des libertés conflictuelles vers le bien de tous et dans le souci de l’égalité entre tous. Non, la mort n’est pas un bien commun. »[xiv] Rappeler la fraternité met en lumière la relation à l’autre comme au cœur de notre humanité, une relation personnelle et communautaire qui rend chacun différent dans notre approche et nous invite alors à l’intelligence relationnelle pour trouver la juste attitude. Or cette intelligence relationnelle s’inscrit dans le temps et demande la confiance, sinon elle se révèle violence. Peut-on alors avoir confiance en quelqu’un qui nous aidera à mourir ? Quelles sont les intentionnalités qui se déploieront derrière les bons mots et les idéologies ? Comment ne laisserons-nous pas la porte ouverte à toute forme d’instrumentalisation, comme le besoin d’un organe ou l’attente de l’héritage ? Un soupçon irrémédiable sur toutes les relations entrave ainsi la fraternité d’un sceau de défiance.

 

La problématique de la vie, dans une conception stoïcienne d’en finir avec la décrépitude, n’est pas nouvelle. Néanmoins, l’avancée des techniques et la connaissance que cela implique, jumelées avec une forme d’inconscience de l’utilisation du savoir, engendrent des comportements redoutables. Il y a une forme d’ignorance qui peut être utilisée au détriment de la personne, c’est là qu’on parle d’instrumentalisation. De plus le contexte joue sur la prise de décision, en inclinant les choix vers ses propres désirs, ce qui n’est pas sans interroger sur la liberté de la personne et notre rapport fraternel. Mais c’est aussi mettre un minuteur sur une bombe de déflagration qui lorsqu’elle explosera ne laissera plus rien du respect de la relation humaine. L’enjeu est considérable, car le marché de dupes dans la recherche d’un passage en force d’une loi se paye toujours. La libération sexuelle des années soixante-dix, avec la libération des corps, n’est pas étrangère aux affaires exponentielles de pédophilie, ni aux problèmes d’infidélité et de déstructuration des familles entraînant une violence sociétale sans précédent, les USA ayant un train d’avance en ce domaine. Penser que l’euthanasie n’aura aucune incidence sur notre société est, au mieux, de la naïveté confondante, au pire de la manipulation perverse d’une fracturation sociale aggravante annoncée comme inéluctable.

2     Notre rapport avec la mort

La liberté ne peut pas s’affranchir de l’autorité. Un choix libre ne peut être remis en question, car il fait autorité, lorsqu’il résulte d’une concertation et que le contexte est sensiblement le même. La question de vouloir passer à tout prix sur une idéologie « d’un ce que l’on deviendra plus tard », doit être combattue avec force, comme une instrumentalisation du temps, et un jugement téméraire et hasardeux, issu d’une éthique inconséquente. Mais la problématique récurrente de cette volonté de passer en force la loi sur l’euthanasie, indique un rapport à la mort, de fait, angoissé. Dans une société à forte dépréciation humaine et ostracisme exacerbé, la logique d’une vision dépressive de la vie fonctionne en parallèle avec nos limites humaines et les incapacités que nous pourrions connaître. La solitude et la souffrance sont présentées par définition insupportables, avec toujours la même confusion entre douleur et souffrance. Toute douleur doit pouvoir être soulagée, et toute souffrance accompagnée. La discussion sur l’euthanasie est centrée sur la personne malade et dans une situation difficile. « Altérer sa vigilance jusqu’à mettre en jeu ses capacités de jugement et de relation ne peut être décidé impunément, sans manquer de respect à son égard et abuser de sa confiance. »[xv] La question du rapport à la mort est aussi une question de la relation à l’autre et à ce qui nous entoure, afin de se reconnaître dans un environnement serein et non menaçant, surtout en pleine tempête. Donner la possibilité d’avoir une arme chargée à une personne suicidaire est considéré déjà comme une faute lourde, qu’en est-il d’une proposition de mort à une personne accablée par la souffrance, sans le discernement pour un choix serein ?

 

2.1                Une vision bien utilitariste du vivre dans son corps

Le rapport à la mort, dans la demande d’euthanasie, implique une vision utilitariste de la vie et une vision réductrice de ce qui fait sens. À cela s’ajoute la perte du sens de Dieu pour arriver au néant du questionnement et de l’interdit de toucher la vie. Reposer la question de manière incessante devient alors un harcèlement intolérable. Il n’est plus question de dialogue, dans un tel climat de violence induite. Nous ne pouvons pas réfléchir à un acte sans espérance, ni vouloir par des bons sentiments réduire à néant ce qui est de l’ordre de la relation humaine. Évacuer la relation humaine à cause de l’expérimentation de nos limites humaines, c’est réduire la personne humaine à un concept de pulsions de l’instant, tout en évitant d’y voir la temporalité du désir.

 

Or justement la vie, comme notre mort, s’inscrit dans le temps et notre conscience évolue sans cesse dans un contexte mouvant. Se poser la question ex nihilo est absurde. Nous ne pouvons réfléchir notre mort lorsque nous sommes en pleine santé et dans une vision très lointaine de cette réalité. Néanmoins, certains objecteront que des demandes émanent de personnes qui le vivent dans un contexte très proche. Mais là encore, souvent c’est un manque de sollicitude, d’accompagnement, et souvent de négation qui occasionne une pensée de dépréciation de la vie, et par contrecoup de soi. « Nous trouvons une tragique expression de tout cela dans l’expansion de l’euthanasie, masquée et insidieuse, ou effectuée ouvertement et même légalisée. Mise à part une prétendue pitié face à la souffrance du malade, l’euthanasie est parfois justifiée par un motif de nature utilitaire, consistant à éviter des dépenses improductives trop lourdes pour la société. »[xvi] La vision utilitariste de l’autre comme objet implique une instrumentalisation du langage pour faire passer la pilule. Cela impacte l’éthique économique, le partage et la nécessaire solidarité. D’où l’importance de notre relation à l’argent et de la recherche d’un bien commun, auquel nous devons être attentifs.

 

Tous les centres qui accompagnent les personnes en fin de vie confirment que lorsqu’il y a des demandes explicites d’euthanasie à l’arrivée dans l’établissement, après un accompagnement et une prise en soin, cette demande s’estompe pour un rétablissement de la relation humaine et un accompagnement respectant vraiment sa dignité, valeur ontologique de toute personne, et précisons le quel que soit son état. La personne humaine garde sa dignité tant qu’il y a un souffle de vie et le corps reste l’empreinte de cette dignité, d’où l’enterrement et l’accompagnement du deuil.

2.2                Une société permissive

Le danger d’une société qui se voudrait permissive est le fait de tuer quelqu’un et de renommer l’acte en une forme de meutre qui  respecte la conscience de chacun dans son individualité, et devient légitime. N’est-ce pas une demande faite à cause d’une rupture de fait dans l’accompagnement des personnes. Pourquoi défendre le respect de la vie, alors que la possibilité de la mort deviendrait normative ? De plus, à quoi servirait de déployer les moyens si la mort est une option comme une autre, et devrions nous d’ailleurs y mettre un pan de notre économie, alors qu’elle pourrait y être redistribuée dans d’autres secteurs ? Poser la question de l’euthanasie sans y voir toutes les implications, ou pire pour ceux qui sont dans une éthique conséquentialiste, penser pouvoir gérer les problèmes après coup, paraît ubuesque et irresponsable. D’ailleurs la complexité est telle à ce niveau qu’en Belgique par exemple, une armada de précautions avant d’aboutir à la décision sabordent la démarche juridique. Ainsi la loi devient un naufrage puisque entre 5% (côté Flamand) et 20 % (côté Wallon) des décisions prises respectent la loi selon une étude d’évaluation de sa mise en pratique, sans parler des conséquences dramatiques d’une complaisance dans la plainte et de l’invitation à sauter le pas, surtout si l’héritage est conséquent ou le coût pour la société important. Mais rassurons-nous, c’est pour le bien de la personne… Entre l’ironie et le cynisme, où est le sens de l’homme ? Néanmoins, il nous faut aussi réfléchir sur l’importance de la vie et de la réalisation d’œuvres belles et bonnes, à transmettre aux générations comme une contribution à un monde meilleur, et non un pillage des ressources sans s’inquiéter de l’avenir… tout est lié dans cette mentalité du renfermement sur soi et de la dispensation d’une mentalité dépréciative de soi, des autres et de la vie en général, jusqu’à ne plus faire d’enfant (pour quel avenir ?), ou pire encore avorter pour ne pas s’encombrer des naissances à venir. Le rapport à la mort devient un coefficient de risque et bénéfice, dans un équilibre de qualité de vie pour soi et entre soi. Tout cela est bien dramatique.

Il ne serait pas juste de clore ce rapport sur la mort, sans parler de notre fin dernière et de la vertu de la grande espérance qui nous pousse à travailler à la civilisation de l’amour afin de mettre le règne de Dieu dès ici-bas. Or même là, dans nos communautés, malgré le rappel constant de l’Église, nous pouvons éprouver une certaine stupéfaction de ne pas être plus engagés. Quelle est l’espérance du Salut que nous portons autour de nous ? C’est une vraie question qui mérite un déplacement plus important sur les fins dernières et notre espérance. Néanmoins, sur le rapport à la mort, nous devons, en tant que croyants, nous questionner sur ce point de manière spécifique et personnelle, pour trouver les bonnes réponses, dans la contemplation du Christ par l’intelligence des Écritures au souffle de l’Esprit, et dans la tradition apostolique.

 

2.3                Pour quel accompagnement ?

Il faudrait aussi contextualiser dans cette période particulière, où l’on enterre les morts sans même la possibilité d’assister aux mises en bière ni d’un dernier adieu digne. Le traumatisme d’une cérémonie d’enterrement à une autre cérémonie dans un laps de temps si court, donne un mal-être général et une perte de goût de la vie qu’il faut accompagner avec justesse, pour y amener un regard d’espérance. Oui, un mourant s’accompagne et c’est d’abord le rôle de la famille : les soignants ne peuvent la chasser pour une professionnalisation de la relation ou par paranoïa d’un tout sécuritaire.

 

Synthèse

            La mort fait partie de la vie, non comme une fin mais comme une étape à la promesse du Salut. La question du sens est donc première. « Oui, le mot « euthanasie » est un gros mot chargé d’histoire. Comme le mot « eugénisme » d’ailleurs. Mais ce n’est pas une raison pour les éliminer avec la bonne conscience de supprimer le fameux risque de “reductio ad Hitlerum. … La sédation, c’est fait pour diminuer la conscience de certains patients qui souffrent trop. Ce n’est pas fait pour diminuer ou supprimer la conscience morale des soignants. »[xvii] Retrouver le sens de l’action c’est vouloir bâtir une civilisation espérante, pour vivre l’amour de Dieu et du prochain à travers le dynamisme de la relation et de son ouverture féconde vers l’amour. « Le Christ est l’ultime parole de Dieu à ce propos ; en effet l’Alliance, qui, avec Lui et par Lui, est établie entre Dieu et l’humanité, ouvre une perspective de Vie infinie et l’accès à l’arbre de la Vie – selon le plan originel du Dieu de l’Alliance – est révélée à tout homme dans sa plénitude définitive. Ce sera la signification de la mort et de la résurrection du Christ ; ce sera le témoignage du mystère pascal. »[xviii] Ainsi rappeler la source de la vie, c’est faire profession de foi pascale, pour lutter contre les œuvres des ténèbres et se laisser illuminer par la présence de Dieu qui est vie pour l’éternité. À la lumière pascale, toute souffrance et toute finitude humaine trouvent leur aboutissement dans le sacrifice de la foi et le mystère de la résurrection.

 

Vouloir toucher à la mort, ou l’ordonner à une pensée utilitariste, c’est-à-dire penser l’homme comme amas de cellule ou comme objet de transaction plus que de transition, revient à remettre en cause le sacrifice pascal et le Salut définitif réalisé par le Christ. « La résurrection n’est donc pas seulement une manifestation de la vie qui triomphe de la mort – une sorte de retour final à l’arbre de Vie dont l’homme a été éloigné au moment du péché originel – mais aussi une révélation de la destinée ultime de l’homme dans toute la plénitude de sa nature psychosomatique et de sa subjectivité personnelle. »[xix] Nous ne pouvons pas parler de la mort dans la foi sans avoir une vision eschatologique, c’est-à-dire une vision des fins dernières, avec la réalisation de la promesse du Seigneur qui viendra nous sauver. Il nous faut alors comprendre tous les aspects de notre vie comme un don pour Dieu dans une volonté d’accompagner le plus justement chacun pour soulager et faire œuvre de compassion, offrant  notre vie, configurée au Christ, afin de passerd’un amour dans le temps à un amour éternel.

 

Notons-le, les interdits moraux sont là pour nous guider sur un chemin de liberté et non pour entraver nos choix par des valeurs qui nous sont étrangères. Au contraire, celles-ci sont fondées sur notre nature même d’homme et de femme, créés à l’image de Dieu et appelés à sa ressemblance, c’est pourquoi nous comprenons les commandements de Dieu et notre agir dans une logique d’ajustement à notre vocation première. L’inquiétude face à la mort est cette prise de conscience de l’existence humaine, de sa valeur et du sens qu’on veut lui donner dans les actions que nous menons. Ainsi l’angoisse de la finitude et l’acceptation d’un don de Dieu dans la maîtrise de soi apprend alors l’abandon au dessein toujours bienveillant du Seigneur. Le jugement des vivants et des morts se révèle alors le jugement de l’amour, dans la responsabilité de nos actes. Chercher à exclure du langage la vérité des actes apparaît dissymétrique et mensonger. Il s’agit toujours d’une recherche de bien faire pour un meilleur bien, et non de répondre par l’angoisse à la souffrance. La compassion n’est pas l’absence de l’intelligence relationnelle dans la vérité des actes, mais bien un accompagnement adapté à chaque personne.

            Le nihilisme[xx] politique interroge le croyant parce qu’il est rarement en recherche du bien de l’homme, en oubliant Dieu. Nous voici en conflit entre la relation avec ce monde et la relation avec Dieu, dans une recherche de fraternité. Or nous ne pouvons penser notre agir humain sans entendre la voix du Seigneur. « Un des lieux essentiels de la rencontre entre la vie morale et la vie spirituelle touche à la question du combat spirituel. »[xxi] Nous voici ainsi au cœur de la problématique de l’euthanasie et de la culture de mort, pour savoir quel est le combat que nous devons vivre à travers l’évangile de la vie et la vérité de notre foi. « A la source de toute violence contre le prochain, il y a le fait de céder à la « logique » du Mauvais, c’est-à-dire de celui qui « était homicide dès le commencement »[xxii] »[xxiii]. S’inquiéter des lois et des discussions de la cité est de notre responsabilité. Il faut aussi discerner le manque de dialogue et l’instrumentalisation des propositions pour avoir une position éclairée. Rien ne sert de discuter avec le Diable, cela implique que dans la mauvaise foi et la fermeture idéologique, le silence et la prière restent la meilleure solution ainsi que la résistance passive du rejet de ce genre de proposition malheureuse. Pour dialoguer il faut être deux, même si certains partisans de l’euthanasie entendent le dialogue comme alignement sur leur positionnement, cela rend un peu stérile toute argumentation. Il faudrait aussi rejeter les propositions sans avancer d’autres arguments que ceux de la conscience. Devant la mauvaise foi, et l’instrumentalisation du langage, il faut discerner ce qu’il est possible de dire et de faire et refuser ce qui n’est plus en notre pouvoir. La prière est lieu de conversion, car Dieu agit.

 

Ainsi, à la demande d’euthanasie comme incompréhension de la souffrance, d’une part, et du refus de la corporéité d’autre part, il nous faut rappeler la dimension du langage du corps comme unifié à l’âme en continuité de l’écologie intégrale. « L’épreuve de la vie et de la mort, comme pierre de touche, n’appartient-elle pas elle aussi au « langage du corps » ? Le terme « mort » n’est-il pas, pour ainsi dire, l’ultime parole de ce langage qui parle du caractère accidentel de l’être humain et de la corruption du corps ? »[xxiv] Ce langage n’est pas celui d’une destruction de la vie, mais d’une autre réalisation de la vie par le corps glorifié, dont nous n’appréhendons pas encore toutes les dimensions, mais que nous connaîtrons pleinement lors du jugement final.

 

            Enfin, sur les débats qui sont menés au cœur de la cité, il n’est pas possible d’écarter la raison économique de l’euthanasie et les problématiques que cela pose, sur l’intentionnalité de l’acte, et la défiance que cela impose dans les relations humaines. Il est vrai que c’est déjà le cas dans des mariages, où l’on se demande si c’est le conjoint ou l’argent du conjoint qui fait le contrat. Il en va de même pour l’euthanasie, la demande d’organe, ou l’héritage voire le refus d’accompagnement de la fin de vie, à cause d’une rationalité économique qui sera toujours source d’interrogation, même si certains font partie du club « ça n’a rien à voir ».

 

            La question de la vie et de la mort, dans la foi, est reliée au mystère du Salut de Dieu à travers l’incarnation du Christ, sa mort et sa résurrection. « On reconnaît à la mort de Jésus une signification rédemptrice qui annule notre état de pécheur devant Dieu et instaure entre Dieu et l’homme une relation de salut. »[xxv] N’oublions jamais cet aspect primordial de la grande espérance pour défendre le mystère du Salut au-delà d’une compréhension parcellaire, mais dans la confiance au plan de Dieu et la compassion pour notre prochain.

           

16 avril 2021 – Père Greg – Curé

Saint Charles Borromée – Joinville-le-Pont

 

 

 

[i] &20 Evangelium Vitae

[ii] TDC 22-5 p 213 Yves Semen

[iii] Op cité p 214

[iv] P 157 Traité fondamental de la foi de Karl Rahner

[v] Rm 8,5-8

[vi] P 117 La tentation de l’euthanasie collectif Vespieren / Richard . Ricot

[vii] Déjà en vigueur en Suisse notamment

[viii] Art 221-3 qui parle de l’assassinat comme meurtre avec préméditation art 132-72 du code pénal

[ix] Loi pour l’euthanasie – Bruno Saintôt

[x] Lettre de rentrée 2018, 1-2 &3

[xi] Lettre vacances 2019 2-2 Euthanasie « Faisons sauter nos chaînes, rejetons ces entraves ! »’

[xii] P 255 la tentation de l’euthanasie op cité

[xiii] Loi pour l’euthanasie : désolé ça ne passe pas – Bruno Saintôt

[xiv] Loi pour l’euthanasie op cité

[xv] P 102 La tentation de l’euthanasie collectif Vespieren / Richard . Ricot

[xvi] &15 Éevangile de la vie

[xvii] Loi pour l’euthanasie op cité

[xviii] & TDC 65-6 p 365

[xix] TDC 71-1 P 383

[xx] Rien n’existe au sens absolu, et donc rejet de toute idée de transcendance dans la loi

[xxi] P 331 Interpréter et agir – Alain Thomasset

[xxii] Jn 8, 44

[xxiii] &8 Evangelium Vitae

[xxiv] TDC 115-4 p 534

[xxv] P 316 Traité fondamental de la foi, Karl Rahner op cité