Carême 2021 – Lettre du 1er dimanche

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            « Aussitôt l’Esprit le pousse au désert. » l’invitation du carême à la conversion nous mène vers la joie de Pâques et de la libération. Certes, elle est murie par le renoncement à soi-même et l’abandon à la providence, mais reste toujours dans cette recherche de vie dans l’Esprit. En cela, c’est une joie des retrouvailles avec Dieu dans l’accomplissement des Ecritures parce que nous conformons toute notre histoire à sa Parole de vie, Lui qui en est la source. C’est ainsi que nous témoignerons de la rencontre qui donne sens à toute notre existence, car la conversion nous fait prendre un nouveau départ, où nous voulons rendre compte de ce que nous vivons. « Je veux méditer à nouveau et annoncer l’Evangile de la vie, splendeur de la vérité qui éclaire les consciences, lumière vive qui guérit le regard obscurci, source intarissable de constance et de courage pour faire face aux défis toujours nouveaux que nous rencontrons sur notre chemin. »[i] C’est l’amour de Dieu pour les hommes que, dans l’appel au désert, je redécouvre par sa radicalité, afin d’éclairer ma vocation unique et de l’unifier en présence de mon Rédempteur. La vie de l’Esprit est cette recherche dynamique de l’amour pour purifier, unifier, envoyer. Or, le premier envoi après le baptême est justement le combat spirituel du désert, autrement dit la présence de Dieu qui se révèle dans le dépouillement de tout notre être. C’est un chemin baptismal pour renouveler l’Esprit qui demeure en nous par grâce et demande une attention de chaque instant pour être disponibles à sa présence.

 

1     La vie dans la foi demande une purification intérieure

La naissance de la vie spirituelle,  qui consiste à retrouver le chemin familier vers Dieu grâce au baptême, perdu depuis les origines, demande un investissement de tout notre être (corps, âme, esprit). Cet appel à vivre l’expérience de l’intimité avec Dieu demande le calme des grands espaces désertiques, ainsi que le silence pour se détacher pleinement du quotidien et retrouver l’unité de sa tonalité intérieure. Nous devons retrouver la musique qui fait vibrer en harmonie toute notre existence et fuir les altérations du péché pour nous mettre au diapason de Dieu. L’Esprit nous guide sur cette musique intérieure pour retrouver le récit de notre vocation propre et y mettre les paroles de Dieu. Il s’agit de nous retourner vers Dieu pour Le trouver enfin dans la vérité d’une expérience d’abandon. Oui, nous pouvons Lui faire confiance, car c’est justement lorsque nous en avons le plus besoin, qu’Il se présente et qu’Il vient, contrairement aux faux amis qui nous abandonnent. Cette expérience particulière du désert et du combat spirituel nous renouvelle complètement et transforme notre relation aux autres et au monde. Ceux qui ont vécu une coopération généreuse en Afrique ou en Asie reviennent avec un autre regard en France. Il en va de même pour ceux qui expérimentent les limites de la mort, passant près d’eux en les esquivant cette fois. Ils vivent un autre rapport au temps et aux personnes. L’expérience du désert et du combat fait expérimenter aussi ce changement spirituel de fond, qui oriente toute notre vie vers d’autres horizons où Dieu est présent. La Parole de Dieu cachée par l’encombrement de notre vie, devient la lumière de tout notre être. Faire silence dans nos vies et nous désencombrer de nous-mêmes permet à Dieu de se révéler pleinement tel qu’Il est. C’est dans notre corps par le jeûne, dans notre âme par la prière, et dans l’esprit par l’intelligence du partage que nous nous laissons rejoindre et transformer par la grâce. L’expérience intime de la présence de Dieu, présent ici et maintenant, s’extériorise dans le témoignage vibrant d’une merveilleuse rencontre. L’Esprit nous couvre de son ombre dans cet enfantement à la relation féconde.

 

Mais le Satan est toujours là, refusant cette proximité avec Dieu et sans cesse nous faisant voir les tentations de l’illusion et du superficiel, afin de ne pas nous laisser aller en profondeur. Le risque pour le Diable est justement que nous laissions ce qui apparaît appétissant mais se révèle sans saveur, pour une simplicité de vie où nous goûtons la saveur de Dieu et vivons du fruit de l’arbre de vie dans une communion fraternelle. Or « à la source de toute violence contre le prochain, il y a le fait de céder à la « logique » du Mauvais, c’est-à-dire de celui qui « était homicide dès le commencement. »[ii] … Ainsi, le meurtre du frère à l’aube de l’histoire donne un triste témoignage de la manière dont le mal progresse avec une rapidité impressionnante : à la révolte de l’homme contre Dieu au paradis terrestre s’ajoute la lutte mortelle de l’homme contre l’homme. »[iii] L’enjeu de se retirer au désert, c’est de soustraire de l’équation le paramètre de la fraternité pour s’apercevoir que le résultat principal est d’avoir été sourd à l’appel de Dieu. Notre conversion est d’abord une rencontre personnelle et une transformation de notre vie avant de vouloir changer celle de l’autre. Cette conversion est une prise de conscience de notre propre dysfonctionnement avec Dieu, avec nous-mêmes et avec nos frères. Une fois que nous aurons opéré les changements nécessaires, alors nous pourrons revenir au cœur de la cité et partager en vérité l’amour de Dieu pour moi et pour chacun d’entre nous.

2     Un appel à la conscience droite éclairée par l’Esprit

            « Le baptême ne purifie pas de souillures extérieures, mais il est l’engagement envers Dieu d’une conscience droite.»Jésus nous sauve par sa mort sur la croix et sa résurrection, pour nous faire entrer dans une vie nouvellenotre responsabilité propre est de progresser vers une liberté pleine et entière. Le baptême est le sacrement qui nous engage à suivre le Christ parce que nous sommes enfants de Dieu. L’engagement personnel d’une vie de conversion, que nous prenons chaque année sur cette route vers Pâques grâce au Carême, est un engagement communautaire, en ayant souci du frère dans l’entraide mutuelle et une disponibilité à chacun dans le service et le témoignage. Le baptême nous rend donc coopérateurs de l’œuvre de Dieu en exerçant nos compétences au service de l’Eglise et en prenant nos responsabilités face aux tâches qui nous incombent. « Dans les crises, le cœur se révèle : sa solidité, sa miséricorde, sa grandeur, sa petitesse. Les crises nous placent devant la nécessité d’élire, de choisir et de nous engager sur un chemin. »[iv] Un travail de conversion que nous devons vivre dès notre adhésion au Christ, comme une liberté de l’amour qui demande d’abandonner le vieil homme, afin de nous transformer et ainsi réveiller le monde de sa torpeur spirituelle, par notre zèle missionnaire.

 

L’engagement envers Dieu demande le travail d’une conscience droite, par la vérité de notre vocation de fils de Dieu, qui nous engage à ajuster nos choix à cette dignité propre. Nous pouvons, au nom d’un sentimentalisme ou dans un contexte familial ou historique difficile, être perturbés par d’autres valeurs et ainsi avoir une conscience erronée, tout en pensant être dans le vrai. On entend parfois : « c’est pour ton bien ». La notion du bien qui heurte notre conscience touche à notre liberté, et donc à la dignité de fils de Dieu, à travers les actions posées. Néanmoins, dans une démarche communautaire, nous devons être attentifs au souffle de l’Esprit pour nous laisser guider en Eglise, dans un chemin de sainteté. Or, c’est ensemble que nous sommes amenés à vivre cette civilisation de l’amour. « Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les personnes et les groupes s’éloignent d’une décision aveugle et tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité. »[v] Il nous faut donc comprendre que la conscience erronée est une atteinte à l’homme qui amène à des décisions aveugles, parfois tyranniques. La conversion que nous sommes amenés à vivre durant le carême est justement de mettre à distance notre moi personnel, pour être à l’écoute de la révélation du Verbe et ainsi éclairer notre conscience de l’eau vive de l’Evangile. C’est-à-dire être attentifs à tous les aspects de la relation de l’homme avec son créateur et vérifier le bon équilibre de sa relation au monde et au frère. C’est la définition même d’une écologie intégrale qui prend en compte toutes les composantes de l’homme dans son unité afin de vivre une conversion en profondeur, et non extérieure à soi.

 

3     Une lumière de l’être plutôt qu’un halo de l’agir

Cette lumière de la vérité nous est donnée par la vie dans l’Esprit Saint. Plus nous laissons la grâce agir en nous, et plus nous reconnaissons au plus intime de nous-mêmes la présence du Seigneur. Néanmoins, nous sommes invités à un certain discernement afin d’avoir la sagesse de reconnaître ce qui vient de Dieu, ce qui est de nos désirs humains ou des tentations du Malin. C’est pourquoi l’Esprit pousse Jésus au désert, comme il pousse chacun d’entre nous à ce silence intérieur pour que, dans notre humanité, nous discernions les pas de Dieu. Quarante jours, comme une purification enracinée dans l’espace et le temps, une errance catéchétique (enseignement dans l’errance d’un apprentissage de la docilité à la Parole) afin d’accéder à la terre promise. L’Esprit nous pousse à entrer dans cette réception de la grâce et non de ce que nous voudrions recevoir. Le don demande l’accueil et la capacité de réception, c’est-à-dire d’élargir l’espace de notre cœur à la dimension de la joie du Seigneur. L’Esprit Saint, en nous amenant au désert, met notre cœur au diapason de l’amour de Dieu et nous fait rencontrer notre Sauveur dans le dépouillement, afin de revêtir l’homme nouveau. Car c’est dans le désert que l’Esprit a toute sa force pour transformer notre cœur et nous rejoindre, dans la liberté de nos choix, pour aller à l’essentiel.

 

Le défi est bien là : quitter l’activisme et le sécularisme grandissant dans le travail de la charité, qui sont dommageables à la foi. En tant que serviteur du Christ et dans la méditation des Ecritures, je peux aider mon frère concrètement à faire face. Le désert est le lieu de la rencontre sincère. « La familiarité avec le Dieu personnel et l’abandon à sa volonté empêchent la dégradation de l’homme, l’empêchent d’être »[vi] esclave de ses propres désirs ou d’idéologies prolongeant la culture de mort. Nous comprenons alors pourquoi c’est le lieu aussi du combat spirituel, car faire place à Dieu et rechercher cette humanité intégrée dans la vocation de fils de Dieu, dérange celui qui cherche à diviser, autrement dit le Diable. Jésus, en allant au désert, participe à notre combat d’êtres humains pleinement irradiés par la présence de Dieu, en faisant sa volonté dans une conscience claire et libre de ce qu’il faut opérer pour Le suivre. Plus nous posons des actes concrets de liberté, plus nous nous rapprochons de Dieu et plus nous vivons notre responsabilité en serviteurs fiables.

 

 

L’appel du désert demande, dans le silence, de retrouver la voix du Seigneur et d’être à son écoute. « La prière comme requête, intercession, action de grâce et louange, est la première manière par laquelle la Parole nous transforme. »[vii] Mais cette conversion demande un travail où notre conscience est formée, puis dynamisée par la foi, l’espérance et la charité, de manière à discerner les valeurs en questions pour trouver le jugement adéquat, tel Salomon. Le désert, dépouillé de tout, nous fait aller à l’essentiel et, dans la vertu de prudence, nous engage à la fidélité pour choisir Dieu en toute chose, suite à un travail de l’intime conviction afin de travailler pour le règne de Dieu. Il n’y a pas de conflit de valeurs, ou d’appels à l’égarement du superficiel, le désert nous rappelle à l’engagement premier de notre corps, qui est de boire et de se nourrir, et à celui de notre esprit d’être disponible à la grâce. Se retirer du monde et de nos autres relations, c’est retourner à ce qui est l’essence de notre vie et, en même temps, se poser les questions fondamentales de la vie, de la mort, de l’amour dans la relation. C’est une construction de maturité de la volonté pour bien agir et un chemin d’humanisation dans le discernement prudentiel. Il ne s’agit donc pas d’être, en fonction de ce que l’on croit de notre relation à Dieu, mais de ce que l’on reçoit de Lui et qui nous rend responsables du déploiement de ses dons. La liberté demande alors de veiller dans nos choix à rechercher toujours la dignité de l’homme et ce qui l’humanise, que ce soit nous ou notre frère, c’est un chemin de Pâques où le Christ ressuscité nous renouvelle.

 

4     A la source de la vie dans le désert

C’est dans cette réception du don de la vie que nous comprenons alors l’importance du frère et de sa dignité propre. « Il n’y a pas que le sang d’Abel, le premier innocent mis à mort, qui crie vers Dieu, source et défenseur de la vie. Le sang de tout autre homme mis à mort depuis Abel est aussi une voix qui s’élève vers le Seigneur. D’une manière absolument unique, crie vers Dieu la voix du sang du Christ, dont Abel est dans son innocence une figure prophétique. »[viii] La conversion que nous devons vivre laisse entendre ce cri que nous voulons taire, à travers l’avortement, l’euthanasie, toutes les violences des injustices économiques, sociales et politiques, toutes les violences envers les personnes humaines, homme, femme, enfant, toutes les violences qui résultent d’un appétit démesuré de dominer au lieu de servir et d’être disponibles dans la gratuité de nos personnes. Justement, l’expérience du désert est l’expérience de la gratuité. Nous avons tout chez nous et pourtant, aller au désert c’est pousser la porte de l’essentiel, afin de retrouver pleinement ce qui fait sens. Rechercher le Christ et lui parler nous réchauffe le cœur par la Parole et nous entraîne à « la vérité tout entière sur la valeur de la vie humaine »[ix]. Nous avons été créés à l’image de Dieu, soyons-en responsables dans nos manières d’être et d’agir, car il nous faut transformer notre vie pour toujours plus nous ajuster à l’amour dynamique du Seigneur. « C’est précisément dans sa mort que Jésus révèle toute la grandeur et la valeur de la vie, car son offrande sur la croix devient source de vie nouvelle pour tous les hommes. »[x] La vie en Dieu demande le don sincère de nous-mêmes et la disponibilité du service, parce que l’amour est pur don. C’est justement ce qu’il nous faut apprendre dans l’expérience du désert. « La loi de l’amour nous guide et nous soutient sur le chemin, l’amour dont le Fils de Dieu fait homme est la source et le modèle, lui qui « par sa mort a donné la vie au monde ».[xi]

 

La vie de l’Esprit nous pousse alors à faire la lumière dans nos choix afin d’orienter notre existence vers la communion avec Dieu. Et nous ne sommes pas seuls, ni premiers, c’est l’Esprit qui nous entraîne et nous aide à redresser ce qui est tordu, c’est l’Esprit qui nous fait entrer dans la joie et nous donne d’être embrasés par la présence du Christ. Quant à nous, notre responsabilité est d’accueillir ce don et de le faire fructifier, dans un engagement sincère et une disponibilité totale au souffle de Dieu. « La Vie donne la vie. Et s’il nous arrive de l’abandonner, alors la Vie nous convertit et nous rappelle à elle par la surabondance de son amour pour l’homme. Bien plus, elle nous promet de nous conduire, corps et âmes, à la vie parfaite, à l’immortalité. C’est trop peu de dire que cette Vie est vivante : elle est principe de vie, cause et source unique de vie. Tout être vivant doit la contempler et la louer : c’est la Vie qui donne la vie en abondance ».[xii]

 

La conversion nous fait rencontrer Dieu et retrouver le sens de la vie dans l’en accomplissement de notre vie d’enfant de Dieu. C’est-à-dire retrouver le chemin de l’alliance afin de nous laisser toucher par la grâce du vivant, et ainsi délaisser tous les choix d’une culture de mort au profit de la civilisation de l’amour. « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. » L’interpellation est large : qu’avons-nous à convertir et que signifie croire à l’Evangile ? On doit le comprendre dans l’annonce du règne, cette civilisation de l’amour, en vivant les commandements dans l’amour de Dieu, en laissant place dans les profondeurs de notre être à sa présence. Alors, nous agissons dans la fidélité à sa Parole avec le zèle de Dieu, dans l’ardente charité pour nos frères. Croire à l’Evangile, c’est toujours croire que le temps est favorable au Salut et à l’annonce de la venue du Seigneur. L’amour de Dieu est premier dans notre vie et nous entraîne à aimer notre prochain dans le principe de réalité de cet amour divin. La création de Dieu, et son alliance se fait avec l’homme en relation et nous invite, ensemble, à changer. Dans la relation au frère, ce n’est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi et me demande de témoigner de la grâce de Dieu. « L’Esprit est aussi la force qui transforme le cœur de la communauté ecclésiale, afin qu’elle soit, dans le monde, témoin de l’amour du Père, qui veut faire de l’humanité, dans son Fils, une unique famille. »[xiii] La conversion est toujours une affaire personnelle, mais elle a aussi toujours une implication communautaire. Le travail de notre conscience doit questionner la conscience de nos frères, pour rechercher ce qui est le mieux pour chacun et pour l’ensemble. La conversion est alors réception de l’amour de Dieu, qui illumine notre conscience de sa présence.

 

Synthèse

 

            Croire à l’Evangile est alors un chemin des béatitudes et résonne dans le carême de manière tout à fait spécifique. La joie de la simplicité de vie évite de nous encombrer de ce qui est étranger au Royaume. La joie de la douceur nous invite à accueillir l’autre dans toutes ses réalités et à essayer de vivre la relation de manière apaisée. La joie de la fidélité à Dieu dans la justice, c’est faire place à Dieu et s’en rassasier tous les jours, à la fraction du pain. La joie de pardonner, alors que nous aurions tant de raisons de nous venger, et de rétablir la juste relation qui reçoit l’amour du Père, qui nous demande la vérité de nos actes, pour répondre de cet amour auprès du prochain. Le pardon doit toujours être compris comme l’écho de l’amour de Dieu et nous devons le vivre dans le réajustement de la relation. La joie que nous connaissons au désert, c’est le grand désir d’être en communion avec Dieu et de le contempler d’un cœur pur, en fils de Dieu. La joie d’une relation où germe la paix, comme lieu de réalisation de l’unité entre nous et d’une espace de communion avec tous, dans la volonté d’une paix véritable pour un monde plus humain. Enfin la joie de la persécution, non comme un attendu de notre relation à Dieu mais d’un fait inéluctable de la vérité de l’amour qui s’oppose à l’esprit de ce monde, replié sur lui-même et refusant l’appel au dynamisme du changement salutaire. L’alliance de Dieu avec l’homme est toujours un appel à la joie, dans la fécondité de la relation. La joie d’une rencontre qui demande la responsabilité de à l’homme pour y répondre pleinement.

 

Il est curieux alors de comprendre que cette joie se trouve au cœur du désert, dans le détachement à la relation du monde, pour retrouver notre liberté face à la loi de Dieu. Ainsi, nous nous transformons de l’intérieur, afin de retrouver dans notre conscience la présence d’une loi inscrite par Dieu, qui fait notre dignité propre et nous appelle à lui obéir afin d’être jugés sur notre propre responsabilité[xiv]. « La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre[xv]. C’est d’une manière admirable que se découvre à la conscience cette loi qui s’accomplit dans l’amour de Dieu et du prochain[xvi]. Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. »[xvii] La distance du désert nous permet de revenir au cœur de la cité pour laisser l’écho de la Parole résonner dans chaque geste que nous avons à faire, chaque attitude à partager, chaque relation à retrouver dans la familiarité des pas de Dieu. Vivre l’Evangile demande de répandre l’amour de Dieu au cœur de toutes nos relations, non de manière extérieure, mais par un changement en profondeur de chacun d’entre nous. « Quelle conversion de l’esprit, du cœur et de la vie le Seigneur nous demande-t-il ? Saint Paul, … affirme : ‘ Ne prenez pas pour modèle le monde présent, mais transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour savoir reconnaître quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui est capable de lui plaire, ce qui est parfait’[xviii] »[xix] Rien ne sert d’attendre que ce soit l’autre qui se convertisse. Par notre manière d’aimer Dieu et d’en parler, de la vivre et de la partager nous deviendrons un témoin lumineux de la Parole. « Le témoignage d’une vie authentiquement chrétienne, livrée à Dieu dans une communion que rien ne doit interrompre mais également donnée au prochain avec un zèle sans limite, est le premier moyen d’évangélisation. »[xx] Redisons le témoignage de notre foi à travers le rétablissement de l’alliance que le carême nous permet d’opérer, dans une recherche sincère de Dieu à travers le jeûne, c’est-à-dire la maîtrise du corps, le partage, dans l’attention fraternelle, et la prière par un dialogue en profondeur avec notre Dieu.

 

Qu’en ce premier temps de pénitence, où nous nous dirigeons vers Pâques, nous sachions écouter le Seigneur nous parler et connaître le chemin de vérité. C’est lui, le Dieu qui nous sauve, et en Jésus nous l’expérimentons tous les jours, dans le souffle de l’Esprit. « Rappelle-toi, Seigneur, ta tendresse, ton amour qui est de toujours.   Il est droit, il est bon, le Seigneur, Sa justice dirige les humbles. »

 

 

21 février 2021 – Père Greg – Curé

Saint Charles Borromée – Joinville-le-Pont

 

 

[i] &6 Evangelium Vitae

[ii] Jn 8, 44

[iii] &8 Evangelium Vitae

[iv]  Message du Pape François au congrès d’éducation religieuse 18 février 2021

[v] &17/1 Gaudium et Spes

[vi] &37 Lumen Fidei

[vii] &87 Verbum Domini

[viii] &25 Evangelium Vitae

[ix] &29 Evangelium Vitae

[x] &33 Evanglium Vitae

[xi] &79 Evangelium Vitae – Cf. Missel romain, prière du célébrant avant la communion.

[xii] Cf 84 Evangelium Vitae – Pseudo-Denys l’Aréopagite, Sur les noms divins, 6, 1-3: PG 3, pp. 856-857

[xiii] &19 Dieu est Amour

[xiv] Rm 2,14-16

[xv] Cf. Pie XII, Message radioph. De conscientia christiana in iuvenibus recte efformanda, 23 mars 1952 : AAS 44, p. 271

[xvi] Cf. Mt 22, 37-40 ; Ga 5, 14

[xvii] &17/1 Gaudium et Spes

[xviii] Rm 12,2

[xix] &87 Verbum Domini

[xx] &41 Evangelii Nuntiandi