L’espérance d’une promesse venue à sa réalisation

Nous voici conviés à méditer ce mystère de la Création dans l’incarnation et la réception de la pleine joie par la réalisation de la promesse. Depuis le commencement, Dieu se proposait d’entrer dans l’histoire de l’homme pour lui faire partager la béatitude céleste, et le péché originel a changé la promesse en une promesse de rédemption. Dès l’origine, en nous créant homme et femme dans notre spécificité et notre complémentarité Dieu y a mis la bénédiction d’une alliance éternelle. Il s’agit bien d’un chant de la création dans lequel, lorsque nous accordons à la volonté de Dieu, nous vivons en harmonie, et lorsque nous laissons nos penchants mauvais et vivons des écarts, nous faussons la musique.

Mais l’Avent est le temps de la veille avant un grand bonheur, de l’accomplissement de la mission d’être disciple dans l’attente de la réalisation de la promesse, avec ferveur et persévérance, toujours prêt pour le jour promis. « Il veille dans l’attente du Christ, celui qui a un cœur sensible, ouvert et accueillant, qui est éveillé, prompt, intuitif, qui se tient aux aguets, ardent à le chercher et à l’honorer, qui l’attend dans tout ce qui arrive et qui ne serait ni surpris ni décontenancé ni bouleversé s’il était mis tout à coup devant le fait soudain de sa venue »[1] Vivre notre fraternité demande alors d’être au service de la charité c’est-à-dire en communion les uns avec les autres dans l’attente de la pleine communion avec Dieu. L’espérance est alors ce temps de mise en pratique de l’amour dans la persévérance, enraciné dans la fidélité à la Parole. Ne nous payons pas de mot, mais vivons le. Le rayonnement de notre communauté ne se fera qu’à travers l’amour que nous aurons les uns pour les autres, et le temps de l’Avent s’authentifie dans une participation active à travers la gratuité du temps.

Notre participation se fait dans la réalité de tout notre être : corps et âme. L’incarnation est la Parole faite corps, un langage spirituel dans le corps. Nous sommes la seule religion monothéiste à signifier la valeur du corps dans le langage de Dieu. L’importance de l’avènement du Christ est bien son incarnation qui reflète ainsi la valeur sacrée du corps comme un espace que Dieu investit aussi. Trop souvent nous avons mis de côté le corps, voire nous l’avons méprisé, comme ne faisant pas partie de notre être, sentiment relayé par des philosophies comme le gnosticisme, qui met la valeur sacrée dans l’âme et réduit le corps à une prison qui l’enferme. D’autres comme les épicuriens ont vécu la valeur du corps comme un absolu, une jouissance d’un bien être exclusif et réducteur, sans travailler à la recherche de la sagesse. Notre corps fait partie de notre salut, c’est ce que veut dire notre credo dans la formulation « je crois à la résurrection de la chair » La venue du Christ nous introduit alors à une dimension du disciple qui accueille son corps comme don de Dieu et l’ordonne à la volonté du Seigneur en toute chose et en tout temps. « il veille avec le Christ celui qui, en regardant vers l’avenir, ne néglige pas le passé et ne se borne pas à contempler ce que son Sauveur lui a acquis au point d’oublier ce qu’il a souffert pour lui. Il veille avec le Christ celui qui fait mémoire de la croix et de l’agonie du Christ et les revit en sa propre personne, celui qui prend sur lui, avec joie, ce manteau d’affliction que le Christ a porté ici-bas et a laissé derrière lui quand il est monté au ciel. » Il s’agit bien d’un temps d’attente comme disciple présent à l’appel de son Seigneur. Un temps de connivence, où l’on sait qu’Il vient à notre rencontre. Laissons-nous habiter par ce temps d’espérance en compagnon de route, prêts à nous faire réchauffer le cœur par sa parole, et à ouvrir nos yeux à chaque Eucharistie pour nous émerveiller de Sa présence et à témoigner auprès de tous de la joie de Le connaitre.

Père Greg BELLUT

Curé modérateur – St Charles Borromée

[1] Saint John Cardinal Newman : Sermons paroissiaux