2018 Février. Lettre des Nations

« Lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël »

Bernadette Lopez. http://www.evangile-et-peinture.org

L’espérance ne déçoit pas, et nous entraine à persévérer dans l’amour afin de reconnaitre dans la fidélité à la Parole la promesse de Dieu se réaliser. Cela demande alors de travailler l’intelligence de la foi à la lumière de la vérité afin d’approfondir ce mystère de l’amour qui se donne et ne cesse de croitre en soi dès que nous le partageons. Loin de nous démunir au contraire, l’amour partagé nous enrichit encore plus dans une profondeur ou coule la grâce de l’Esprit Saint dans le fleuve de la vie intérieur et se déverse dans le calme lac de la paix. La lumière de la vérité nous fait comprendre au rafraichissement de l’amour que le Christ vient nous sauver et qu’il nous redonne notre dignité de fils de Dieu par la croix et la résurrection. Néanmoins « S’il est vrai que la signification salvifique de Jésus ne peut être comprise que dans le contexte de sa révélation du plan de salut de la Trinité, il s’ensuit que l’Esprit Saint est une partie absolument vitale du mystère de Jésus et du salut qu’il apporte. »[i] Suivre le Christ est donc rester à l’écoute de l’Esprit Saint dans notre vie pour faire la volonté du Père. « Nous sommes appelés à devenir des hommes et des femmes d’espérance, en collaborant à la venue de ce Royaume fait de lumière et destiné à tous, hommes et femmes d’espérance. Comme il est triste de trouver un chrétien qui a perdu l’espérance! »[ii] Les brassages culturels dans nos communautés paroissiales sont une richesse pour redonner confiance et nous réconforter dans notre foi afin d’avancer avec confiance dans le chemin du salut qui est vie et vérité.

Une communauté qui se laisse habiter par l’Esprit Saint

Si nous voulons être missionnaires, il n’y a pas à tergiverser, il nous faut demander l’aide de l’Esprit Saint, c’est-à-dire nous laisser embraser par la grâce afin d’être un témoignage vivant dans nos choix de vie, et inventif dans la proposition de la foi que nous devons faire à tous ceux que nous rencontrons. « La création est la libre communication d’amour de Dieu qui, du néant, appelle toute chose à l’existence. Tout ce qui est créé est rempli de l’échange incessant d’amour qui caractérise la vie intime de la Trinité…La présence de l’Esprit dans la création engendre dans tout ce qui existe l’ordre, l’harmonie et l’interdépendance. »[iii] Cela nous rappelle la responsabilité du frère et de ce qu’il devient dans la prise en compte des choix dans la vérité de l’amour. La Bible nous rappelle l’obligation que nous avons à faire une place à l’étranger qui est notre frère de passage, mais aussi le rejet de l’envahisseur qui nous détourne du vrai Dieu.

Cela demande donc du discernement et l’intelligence de l’amour pour laisser murir chacun dans ses choix, et lui donner l’autonomie nécessaire à ses propres responsabilités. Mais la vérité n’exclut en rien une grande prudence, pour ne pas analyser de manière sommaire les réalités, et méconnaitre ainsi la vie du frère donnant un contre témoignage. Le discernement, bien que parfois très difficile, doit toujours être mis en avant, dans une recherche du souffle de Dieu pour nous faire avancer avec prudence et collégialité. Si la prise de décision est toujours personnelle et nous engage selon notre rayon d’action, cela ne nous dédouane pas d’une recherche communautaire de la volonté de Dieu et de la recherche de l’unité. Si nous vivons notre foi dans ce déploiement de discernement alors nous vivons l’amour qui témoigne auprès de tous de l’espérance qui nous habite. « L’espérance ouvre de nouveaux horizons, rend capables de rêver ce qui n’est même pas imaginable. »[iv] La fraternité retrouvée prend un sens nouveau dans l’accueil de l’autre et le respect de soi.

Dans l’accueil de l’étranger j’ai le devoir impératif de toujours témoigner de manière explicite de ma foi. L’accueil de l’autre se fait dans l’accueil du Christ, et je dois en redonner le sens premier.   « La présence universelle de l’Esprit Saint ne peut donc pas servir d’excuse pour omettre de proclamer explicitement Jésus Christ comme seul et unique Sauveur. »[v] Toutefois cette exigence de l’annonce dans la présence universelle de l’Esprit Saint n’impose pas un retour obligatoire. Nous avons le devoir de l’annoncer, non d’en cueillir les fruits. La confusion entre l’annonce et l’obligation de pratique est souvent faites. Je dois dire ce qui me fait vivre dans la foi, l’autre est responsable des choix qu’il pose et de l’écoute ou non de la vérité. Il n’y a pas une méthode de l’annonce de la Toute Puissance du Père à travers l’incarnation du Fils et l’Esprit de Pentecôte qui transforme les vies,  mais plusieurs relations qui introduisent au mystère de la foi. « Jésus ne veut pas de disciples capables uniquement de répéter des formules apprises par cœur. Il veut des témoins: des personnes qui diffusent l’espérance avec leur façon d’accueillir, de sourire, d’aimer. »[vi] Le témoignage se vit dans nos choix, et se prolonge dans l’annonce explicite. Pas de témoignage sans annonce explicite, comme il n’y a pas de témoignage si ce n’est soutenu par la prière, plongé dans la méditation des Ecritures et forgés dans la grâce de l’Esprit Saint.

Parallèlement sur l’accueil de l’étranger, la communion des Eglises demande aussi une aide aux églises locales pour gérer au mieux les réalités du terrain et en trouvant une solution équitable et durable aux problèmes du déplacement. Une aide matérielle et un soutien pastoral est aussi un investissement à rendre responsable chacun dans ses choix économiques. Nous ne pouvons pas déplorer les guerres dans les autres pays en étant un des principaux pourvoyeurs d’armes dans le monde ! Le respect des familles, et de la dignité de la femme est lié au développement et demande une formation adéquate à l’activité missionnaire. En cela nous devons dénoncer les aides économiques qui sont liées à des prétendues avancées idéologiques qui drainent une culture de mort et de négation de la création.  

Nous devons prier, mais nous pouvons agir en cohérence avec nos choix de vie pour aider ceux qui sont resté au pays à promouvoir des solutions de justice et de paix dans un développement responsable. « Le fait que des hommes et des femmes, en diverses parties du monde, ressentent comme les concernant personnellement les injustices et les violations des droits de l’homme commises dans des pays lointains où ils n’iront sans doute jamais, c’est un autre signe d’une réalité intériorisée dans la conscience, prenant ainsi une connotation morale »[vii]. Chacun dans sa vocation propre, et son histoire personnelle est invité alors à agir pour le promotion de la culture de vie dans un respect des biens de chacun et une équité dans la relation avec l’autorité civile. La discrimination raciale qui est pratiqué ici ou ailleurs, comme la discrimination idéologique que nous vivons dans notre pays, doit être combattu par des prophètes rappelant l’impératif de la culture de vie et de la Parole de Dieu qui libère et restaure toute relation.

Une communauté au souffle missionnaire

L’appel missionnaire de notre foi est partie intégrante de notre baptême et de la responsabilité de chacun dans la communauté. L’obligation d’évangéliser doit se faire dans un souci de communion.  « Le monde est en train de s’unifier toujours davantage, l’esprit de l’Évangile doit conduire à surmonter les barrières des cultures, des nationalismes, écartant toute fermeture »[viii]. La recherche de faire communauté en nous rassemblant pour des occasions particulières ouvre à un témoignage ou le temps de Dieu passe avant le souci du monde. Combien de ceux qui nous entourent se font manger par la vie quotidienne en oubliant le temps de Dieu et l’évangélisation du temps à vivre dans nos choix, ce qui implique des renoncements et en même temps la redécouverte de la beauté communautaire. Faire communauté n’est pas se retrouver seulement à la messe ou dans de rares occasions diocésaines, elle se vit dans la réalité de la proximité et de la communauté paroissiale. C’est bien avec nos voisins que nous sommes appelés à rayonner de la grâce de l’Esprit Saint. «Les leçons de l’histoire confirment que, par l’action du Saint-Esprit, l’évangélisation se fait avant tout à travers le témoignage de la charité, le témoignage de la sainteté »[ix]. La vie extraordinaire de Dieu demande alors de briller dans tous nos choix de vie, dans une volonté de conformer sa vie à la Parole, par petit pas ou grande enjambé, peu importe, mais toujours dans une progression libératrice, ou nous façonnons notre vie sur la révélation que nous découvrons toujours encore plus. A trop embrasser, nous pourrions nous perdre, mais à faire selon nos possibilités, avec un travail de progression, nous arrivons à être façonner dans le souffle de l’Esprit Saint et à témoigner en vérité de cette joie de croire. Le Christ nous appelle à le suivre sur ce chemin du don de soi pour participer à la gloire de sa vie divine. « Jésus Christ est la « bonne nouvelle » du salut communiqué aux hommes d’hier, d’aujourd’hui et de toujours; mais en même temps il est aussi le premier et suprême évangélisateur.[x] L’Église doit centrer son attention pastorale et son action évangélisatrice sur le Christ crucifié et ressuscité. « Tout ce qui se projette dans le domaine ecclésial doit partir du Christ et de son Évangile »[xi]. C’est Lui qui nous guide, à travers la Parole de Vie et qui nous envoie l’Esprit Saint pour nous accompagner sur ce chemin d’une plus grande humanisation. Plus nous nous approchons de Dieu et de sa sainte volonté, plus nous développons cet image de Dieu et plus nous accomplissons notre humanité.

La richesse culturelle de notre communauté doit nous permettre de nous laisser questionner sur nos propres certitudes et modes de vie pour comprendre que nous pouvons vivre autrement. « Les Africains ont un profond sens religieux, le sens du sacré, le sens de l’existence de Dieu Créateur et d’un monde spirituel. La réalité du péché, sous ses formes individuelles et sociales, est très présente dans la conscience de ces peuples, comme le sont également les rites de purification et d’expiation. »[xii] Face à une culture française très relativiste qui en a oublié le péché, et mis sous le mode psychique tout le domaine spirituel, nous devons redoubler de vigilance pour ne pas tomber dans l’illusion d’un mode de vie unique. En regardant d’autres cultures, nous sommes peut être appelé à vivre des changements en profondeur pour nous enrichir mutuellement et croitre dans une culture de vie vers un chemin du bonheur. Répondre à cette vie missionnaire demande alors une transformation de nos manières de faire, et de nos façons de voir afin de s’ouvrir à la dimension de la foi, s’offrir un regard d’espérance et d’agir uniquement par amour. « Ainsi, le devoir des chrétiens dans ce monde est celui d’ouvrir des espaces de salut, comme des cellules de régénération capables de restituer la sève à ce qui semblait perdu pour toujours. Quand le ciel est tout nuageux, celui qui sait parler du soleil est une bénédiction. Voilà, le vrai chrétien est ainsi: il ne se plaint pas et n’est pas en colère, mais il est convaincu, en vertu de la force de la résurrection, qu’aucun mal n’est infini, aucune nuit n’est sans fin, aucun homme n’est définitivement mauvais, aucune haine ne peut l’importer sur l’amour. »[xiii] Le témoignage est alors ce rayonnement de l’amour de Dieu dans le champ visuel de l’homme. L’espace du salut est compréhension de l’amour dans l’intelligence de la foi. Comme une lumière de la Parole de vie qui ouvre la raison à la présence de Dieu.

 Cette présence de Dieu qui invite à la communion doit nous inviter à vivre la fraternité comme une construction de la relation qui se vit avec persévérance, en tous temps et en tous lieux. « Puisque le peuple de Dieu dans son ensemble est envoyé pour annoncer l’Évangile, l’évangélisation n’est jamais un acte individuel ni isolé ; c’est toujours une tâche ecclésiale qui doit être accomplie dans la communion avec l’ensemble de la communauté croyante. »[xiv] Cette évangélisation se développe dans une sensibilité de célébration qui est aussi riche que variée, parce que célébrant avec dignité la Toute Puissance de Dieu dans l’histoire des hommes. L’affermissement de la foi qui croit que rien n’est impossible à celui qui a mis sa confiance en Dieu, « car le Puissant fit pour nous des merveilles ».  Nous sommes invités alors dans cette unité à la signifier déjà eu cœur de la famille en mettant la vérité de l’Evangile comme règle de vie, et la grâce de l’Esprit Saint comme source de toute relation. Nous le savons bien la famille est la première cellule d’Eglise et en tant que telle doit être un foyer d’évangélisation qui s’ouvre à la communauté, et avec la communauté participe à une vie de l’esprit. Tout cela prend source dans la beauté du mariage et du sacrement qui ouvre au monde, et participe à la vie du bien commun. « Le mariage, de par sa nature, transcende le couple, puisqu’il a pour mission spéciale de perpétuer l’humanité. De même, par nature, la famille dépasse les limites du foyer : elle est orientée vers la société »[xv] Le couple avec ses enfants témoigne dans l’Eglise cette profusion de l’œuvre de Dieu dans la diversité des charismes de chacun. La vie dans la foi est universelle (catholique), dans la diversité des charismes et selon les dons de chacun. Il n’y a pas d’uniformité dans l’universalité, mais bien une symphonie d’expression pour rendre gloire à Dieu.

Le témoignage de vie et l’annonce explicite de la foi ne va pas sans témoignage ultime par la don de sa vie. Nous pouvons aujourd’hui témoigner de la grâce du témoignage dans les pays d’Afrique, d’Amérique ou d’Asie des martyrs qui ont participé à cette foi que nous proclamons aujourd’hui à un monde si bien laïcisé qu’il en oublie ses origines. L’Europe, et la France ont apporté des témoins de la foi, mais aujourd’hui dans ce partage culturel, chaque martyr des Eglises représentés dans notre communautés sont motifs d’action de grâce et nous invite alors à comprendre la radicalité de l’Evangile, non dans l’exclusion mais l’approfondissement de l’amour qui va jusqu’au don de soi. « Tout cela est don de Dieu, car aucun effort humain ne pourrait avoir accompli une telle œuvre … Il n’y a cependant pas de place pour un triomphalisme humain. »[xvi], mais une action de grâce incessante pour les merveilles que Dieu fait dans notre aujourd’hui. « C’est le martyre qui révèle l’essence même du message chrétien. …et ceux qui ont versé leur sang pour le Christ ont donné le témoignage ultime de la valeur authentique de l’Évangile. »[xvii] La fête de la présentation du Christ au temple est elle-même annonciatrice de la croix, mais aussi de la victoire par la résurrection du Christ. L’émerveillement de la présence de Dieu dans notre vie et dans celle de ce monde n’empêche pas l’hostilité des ténèbres et de ceux qui dans une culture de mort refusent de croire. Nous sommes invités alors à être cohérent avec nos choix de vie et proclamer jusqu’au don de soi cet amour qui enflamme l’existence et partage la relation même devant la haine et la violence. « Du point de vue psychologique, le martyre est la preuve la plus éloquente de la vérité de la foi, qui sait donner un visage humain même à la plus violente des morts et qui manifeste sa beauté même dans les persécutions les plus atroces »[xviii] La vérité ne s’impose pas dans la violence mais dans l’humble présence et la douceur de la relation qui est sa propre force, et son témoignage le plus direct. La vérité s’impose comme une évidence, et combat toute contradiction en révélant la lumière. Aucun besoin de violence physique, puisqu’elle éclaire l’intelligence et apporte la sagesse qui ouvre à la paix intérieure. Une évidence que le témoignage met au jour et que nous sommes invités à imiter.

Défis et signes d’espérance pour l’Église

Nous pouvons énumérer trois défis principaux. Non qu’il faille minimiser les autres, mais parce que ceux-là nous touchent particulièrement au niveau local et au niveau national.

Le premier défi est le consumérisme                                                                                    

C’est le désir du besoin immédiat qui nécessite une réponse qui parfois manque de réflexion et devient tyrannique dans le non-sens qu’elle offre. Cette pulsion incontrôlable de l’avoir dans une forme d’aliénation qui accumule le superficiel. Demander pour n’importe quel objet, la marque qui doit dit-on assurer la qualité, sans se préoccuper de l’utilité ni même de l’utilisation plus ou moins intensive. Le saint pape Jean Paul II, en rentrant dans son pays, après le chute du Mur a été effrayé de voir ce consumérisme pourrir les esprits et délaisser la foi pour les futilités de la vie, afin de vivre moderne et dans le vent. Hélas, ce vent de la mort invite au naufrage et à la perte de soi.  Le consumérisme amène à un dessèchement religieux et à une perte d’engagement nous le voyons d’ailleurs que ce soit en politique, dans la société sur le non engagement au mariage, comme dans l’implication dans la vie communautaire.

Il y a une certaine forme de complaisance dans ce consumérisme en expliquant doctement que c’est notre époque, et qu’il faut bien relativiser les choses. Que nous ne vivons plus comme avant… Certes l’introduction du péché, effectivement nous a fait perdre notre état de grâce originel… Mais l’évangélisation du temps est bien de regarder nos pratiques et de laisser l’Esprit Saint nous guider pour abandonner ce qui doit l’être et réinvestir ce qui a été oublié. La relation prévaut l’utilité. Il vaut mieux laisser son champ que nous venons d’acheter, même si c’est utile d’en prendre possession pour aller au banquet de noce rencontrer le Roi qui honore son Fils. La place de l’étranger dans ce repas prend tout son sens, comme celle de la veuve et de l’orphelin. Et nous devons commencer déjà par notre communauté (sans être exclusif).

Notons enfin une perte d’engagement que nous pouvons observer dans la baisse des vocations religieuses et sacerdotales. La perte de la ferveur marque un désengagement de la foi et un attiédissement de l’amour. « Mais tout cela se révèle profondément illusoire et incapable de satisfaire la soif de bonheur que le cœur de l’homme continue à ressentir en lui-même. Ainsi subsistent et s’intensifient les signes préoccupants de la disparition de l’espérance, qui parfois se manifestent même à travers des formes d’agressivité et de violence [xix]»  Nous avons à travailler notre foi pour témoigner de l’espérance qui nous habite. Elle n’est pas passé, mais bien le futur d’une promesse qui tend peu à peu à se réaliser. C’est bien dans notre monde, et à travers notre culture que nous avons à témoigner de notre foi, et non dans le rêver hypothétique d’un monde ailleurs, parfait ou tout se réalisera selon nos propres désirs (qui deviennent des désirs de puissance).

Nous devons nous faire aider par les autres cultures pour comprendre la conversion qui nous est nécessaire, et l’évolution spirituelle qui peut être vécue en vérité. « Étant donné que, en Amérique, la piété populaire est l’expression de l’inculturation de la foi catholique et que beaucoup de ses manifestations ont pris des formes religieuses autochtones, on ne doit pas sous-évaluer la possibilité d’en tirer aussi, avec une prudence éclairée, des indications valables pour une plus grande inculturation de l’Évangile »[xx] Cette inculturation que nous devons vivre auprès de nos jeunes dans la course à la technologie ou nous devons relever le défi d’une véritable interrogation évangélique pour discerner ce qui aide au développement de l’homme et ce qui l’enterre dans une vaine course à l’illusion et au paraitre.

Le deuxième défi est la laïcisation

Il y a une difficulté à parler de laïcisation, puisque celle-ci déjà en France n’est pas la même suivant l’époque, mais en plus, dans le monde offre une palette d’interprétation, allant d’une laïcisation positive, qui respecte les croyances de chacun tout en assurant le bien commun dans la liberté d’échange à une laïcisation par obstruction qui déni à toute religion l’espace public.

L’objet de la lettre pastorale n’est pas de débattre sur le bienfondé ou non de la laïcisation, mais de ce que cela implique dans notre engagement de disciple du Christ et de Fils de lumière. Or il s’avère que la laïcisation vécue ses dernières années, soit une forme dévoyé d’idéologie christianophobe ou la bêtise ne cesse de s’approfondir sans être capable de toucher le fond tant elle est démesurée. Un des derniers actes médiatique, est d’avoir, (oh horreur), envoyé des élèves de l’enseignement public voir l’étoile de Noel, et faire couper la séance en plein milieu lorsque le personnel s’aperçoit que c’est le récit de la nativité… des fois que ça donne des mauvaises idées aux enfants… ils risqueraient pour de bon de se convertir…

Parce que nous avons été baptisés, nous avons la culture du témoignage et de l’annonce explicite de la foi, que ce soit dans la cours de récréation, dans la rue, ou dans l’entreprise près de la célèbre machine à café. En tout lieu, en tout temps, selon les circonstances et l’appel de l’Esprit Saint nous avons à témoigner de notre foi. Il n’y a pas de demi-mesure, ou de censure. Quand bien même si ce témoignage engendre le martyr. Une idéologie qui dénigre la religion, empêche son expression, et renvoie à la sphère privé ce qui est communautaire est à combattre fermement au nom du Christ Rédempteur. Et le premier combat se fait dans la prière, le partage et le détachement des biens de ce monde. Nous ne pouvons pas opposer une culture à une autre sur l’expression de notre foi pour rester dans la tiédeur de notre engagement. Nous sommes tous appelés à témoigner explicitement. « Dans un monde marqué par le laïcisme et soumis au vertige de la consommation, la vie consacrée, don de l’Esprit à l’Église et pour l’Église, devient toujours plus signe d’espérance dans la mesure où elle témoigne de la dimension transcendante de l’existence. »[xxi] Laissons nous conduire par le souffle de l’Esprit et demandons Lui de nous guider en vérité sur un chemin de vie.

Le troisième défi est une forme d’idolâtrie

Aujourd’hui l’idolâtrie est plus sournoise, mais bien présente dans notre société. J’ai déjà évoqué l’idolâtrie des écrans. Cette incapacité compulsive à se passer de connections, pour ce qui semble être des bonnes raisons. Laisser la télévision en permanence allumer chez soi, ne pas pouvoir passer un repas en famille, sans un bruit médiatique, que ce soit la radio, la télévision ou le téléphone portable. Autant de comportement qui nuisent à la vie intérieure et à l’espace familiale de rencontre.

Néanmoins, d’autres formes d’idolâtrie plus insidieuses voient le jour, comme la poussée médiatique d’une recherche de reconnaissance. Et son corollaire, si c’est passé à la télévision, c’est que c’est vrai…. La participation à des jeux télévisuels est pour le moins suspect lorsqu’ils ne sont pas une forme de drogue dans l’investissement disproportionné. Parallèlement notre investissement à suivre les faits et gestes de tels ou tels émissions nous rend responsable de cet état de fait. Nouveaux jeux du cirque qui ont besoin de ses spectateurs pour survivre.

Une autre forme d’idolâtrie est le souci exagéré pour sa santé, pour ses loisirs, ou pour sa famille, en hiérarchisant sa vie à travers cet investissement qui devient emprisonnement.  Nous pouvons d’ailleurs le vivre par procuration, sur l’importance de mettre le sport en premier, ou les études au détriment de la vie intérieure et de la rencontre avec Dieu. Même si cela va dans le sens d’un dessèchement qui ouvre à une forme de dépression ou de désinvestissement. Regarder notre relation idolâtrique c’est prendre conscience du temps que nous passons pour certaines choses, et vérifier si c’est pertinent, rationnel,  et utile. L’autre manière est de voir quelle place nous laissons à Dieu dans notre vie ?  « « Les temps sont accomplis et le Royaume de Dieu est tout proche: convertissez-vous et croyez à l’Évangile » [xxii]….  L’exhortation du Christ à se convertir trouve un écho dans celle de l’Apôtre: « L’heure est venue de sortir de votre sommeil. Car le salut est plus près de nous maintenant qu’à l’époque où nous sommes devenus croyants »[xxiii]. La rencontre avec Jésus vivant incite à la conversion. »[xxiv] La rencontre du frère nous invite alors à prendre conscience de nos propres fonctionnement et de nous laisser interroger sur nos manières de faire. L’échange de culture amène alors à un enrichissement communautaire vécu dans la communion et nous laissant entrer dans ce temps de Dieu.

De ces trois défis nous devons garder la vertu d’espérance pour continuer de témoigner de notre foi et de mettre Dieu à l’honneur dans notre vie. Réinvestir notre aujourd’hui de la présence de Dieu et témoigner avec audace de la Bonne Nouvelle dans notre vie et ce qu’elle change. « Le chrétien n’est pas fait pour l’ennui; plutôt pour la patience. Il sait que, même dans la monotonie de certains jours toujours pareils, se cache un mystère de grâce. Il y a des personnes qui, par la persévérance de leur amour, deviennent comme des puits qui irriguent le désert. »[xxv] Dans notre communauté des gens s’engagent et proposent des rencontres tant spirituelles que de charité ou de service pour le bien de la communauté. Laissons-nous saisir par l’appel de l’Eglise à être au service du monde et à répandre l’espérance qui nous habite.

Synthèse

Notre brassage dans la communauté paroissiale est source de richesse, si elle se partage. Nous devons nous laisser interroger par ceux d’autres cultures afin de mieux répondre des fruits de l’Esprit Saint qui nous habite et de témoigner avec courage de Celui qui nous habite. Deux dangers nous guettent, celui du communautarisme, à se retrouver qu’entre gens de la même culture ou de la même sensibilité, et celui de l’indifférence qui extériorise toute implication par un rejet au nom de la culture ou de l’expression qui m’est étrangère. Vivre l’espérance nous demande alors de retrouver le sens de la vie fraternelle par notre engagement sans faille. « Que Dieu nous donne toujours la force d’être ses témoins. Qu’il nous donne de vivre l’espérance chrétienne, en particulier dans le martyre caché, de bien faire et avec amour, nos devoirs de chaque jour. »[xxvi]            

Père Greg. BELLUT, curé des paroisses Saint-Charles Borromée et Sainte-Anne de Polangis Joinville-le-Pont (94)

Sources :

[i] &15 Ecclesia in asia

[ii] Espérance : Bonne Nouvelle de la venue du salut –catéchèse du Mercredi, 14 décembre 2016

[iii] &15 Ecclesia in asia

[iv] Espérant contre toute espérance – catéchèse du Mercredi, 28 décembre 2016

[v] &16 Ecclesia in asia

[vi] 34 – Missionnaires d’espérance aujourd’hui  – catéchèse du Mercredi 4 octobre 2017

[vii] &38 Sollicitudo rei socialis 

[viii] &39 Redemptoris missio ,

[ix] Jean Paul IIDiscours à un groupe d’Évêques du Nigéria en visite ad limina (21 janvier 1982)

[x] &7 Evangelii nuntiandi 

[xi] &67 Ecclesia in america

[xii] &42 Ecclesia in africa

[xiii] 34 – Missionnaires d’espérance aujourd’hui  – catéchèse du Mercredi 4 octobre 2017

[xiv] &42 Ecclesia in asia

[xv] &85 Ecclesia in asia

[xvi] &34 Ecclesia in africa

[xvii] &49 Ecclesia in asia

[xviii] &49 Ecclesia in asia

[xix] &10 Ecclesia in Europa

[xx] &16 Ecclesia in america

[xxi] &38 Ecclesia in Europa

[xxii] Mc 1, 15

[xxiii] Rm 13, 11

[xxiv] &26 Ecclesia in america

[xxv] 35 – l’attente vigilante  – catéchèse du Mercredi 11 octobre 2017

[xxvi] 28- force des martyrs – catéchèse du Mercredi 28 juin 2017