2019. Lettre des vacances
« Les paroles du sage sont comme des aiguillons »[i]
Une vie commune avec le Christ se fonde par nos actes en harmonie avec la Parole de Dieu et à son alliance avec une volonté de le suivre dans la radicalité de l’amour. Cet amour qui va jusqu’au bout du don de soi-même, afin de répondre à l’appel de notre maître en serviteur fiable. La Parole éclaire notre vie, travaille notre conscience se médite dans la tradition apostolique et demande une intelligence de nos actes pour être disciple de la lumière en toute occasion. Le repos estival nous invite à prendre la distance nécessaire pour discerner ce que nous avons à vivre dans notre engagement de foi et méditer sur notre histoire afin de reconnaitre la vérité dans une relecture bienveillante et d’apprécier la réalité de ce que nous avons fait. . « Trois choses caractérisent la vie du chrétien : l’action, la parole, la pensée. »[ii]Il y a un vrai travail à opérer pour unifier notre engagement à travers une vie fondée sur la prière et l’Ecoute de la Parole de Dieu. Cela constitue un engagement par la vérité de l’amour sur la réalité de la charité exercé auprès du prochain. Une action ou nos pensées sont toujours enracinées dans le Christ et fait de nous des témoins de miséricorde en vivant comme artisan de paix.
1- Le temps du recul
Prendre du recul demande de vivre un certain lâcher-prise afin de s’abandonner à la volonté du Seigneur. Tout n’est pas compréhensible, et les conversions sont toujours à vivre, mais les vacances, et le repos nécessaire cassent le rythme en nous introduisant à une autre réflexion du temps et de la hiérarchie des valeurs pour redonner sens à ce que nous faisons. En prenant conscience de tous les actes que nous avons posés, nous réfléchissons sur la finalité qui était recherchée, et l’orientation que notre vie à prise. La prise de conscience nous amène à redistribuer nos choix pour aller vers cette recherche du bien et exercer notre volonté en prenant les bonnes décisions afin d’être de plus en plus humains en désirant Dieu et en voulant ce que Lui veut, c’est-à-dire en accomplissant notre appel à la ressemblance à Dieu. Cela ne va pas sans renonciation à d’autres accommodements que nous nous sommes accordés, des facilités de vie qui ne nous ont pas poussés vers le haut. Il y a comme une recherche de vérité divine vers laquelle nous marchons dans la fidélité aux Ecritures .Une ferveur à retrouver pour répondre à l’amour de Dieu de manière de plus en plus authentique. « La foi n’est pas un refuge pour ceux qui sont sans courage, mais un épanouissement de la vie. Elle fait découvrir un grand appel, la vocation à l’amour, et assure que cet amour est fiable, qu’il vaut la peine de se livrer à lui, parce que son fondement se trouve dans la fidélité de Dieu, plus forte que notre fragilité. »[iii]C’est ainsi que dans ces temps de repos il nous faut retrouver nos forces et repenser notre fidélité au Seigneur dans une réorganisation de notre vie qui tienne compte de notre vérité ontologique de fils de Dieu appelés à laisser la lumière divine passer dans tous nos actes.
2- La conversion comme nécessité de foi
Une des erreurs fondamentales face à l’amour est le refus de conversion. Avec comme assertion ‘j’ai suffisamment fait pour l’autre, et je refuse d’avancer’. Justement si j’ai fait plein de choses, et que cela n’a pas fonctionné, c’est peut-être à cause de la dureté du cœur de l’autre, nous pouvons le concéder, mais c’est très (trop) souvent une mauvaise perception de la problématique et une réponse inadéquate. Or justement le refus de perception c’est d’accuser l’autre de ses propres inadéquations. C’est vrai dans le couple, comme dans la vie communautaire ecclésiale, et pire encore dans la vie de la cité que ce soit en politique, ou dans l’entreprise. Quant à notre positionnement avec Dieu, lorsque nous le mettons en accusation sur ce qui nous arrive et que nous refusons la Parole sur des interprétations qui relativise les commandements ou contextualise à outrance les actes, nous commettons une faute grave.
Nous retrouver dans la foi c’est affirmer Dieu dans notre vie, et redonner le sens de notre existence dans une recherche des valeurs essentielles. Non, l’ère du soupçon et de la défiance ne nous atteindra pas, car nous faisons confiance en la Parole, car elle nous guide sur le chemin de la vie. Qu’importe la laïcité stupide qui voudrait faire de la foi un fait privé, cette ironie mordante des jeux du cirque médiatiques et culturels ou la foi est brocardée, l’idolâtrie du sport ou du portable qui gaspille le temps. Habiter notre foi nous engage à aller à l’essentiel et persévérer dans relation à Dieu avec audace et confiance. La fidélité est le plus beau chant d’amour dans le temps et en même temps l’espace de la transformation intérieure la plus profonde ou la mélodie de Dieu s’harmonie à notre vie. Nourrir la liberté à l’obéissance de la volonté de Dieu comme aliment du bonheur où nous pouvons jardiner avec fécondité notre vie en présence du Seigneur. C’est pourquoi la vérité est le plus beau réalisme de notre engagement dans tous les actes. « Dans ce dialogue avec Dieu, nous nous comprenons nous-mêmes et nous trouvons la réponse aux interrogations les plus profondes qui habitent notre cœur. Car la Parole de Dieu ne s’oppose pas à l’homme, ne mortifie pas ses désirs authentiques, bien au contraire, elle les illumine, les purifie et les porte à leur accomplissement »[iv]La foi se comprend alors comme l’accomplissement de la Parole de Dieu dans notre existence, comme une source de bonheur, une joie de la rencontre, un espace de conversion sincère où tout prend enfin sens parce que Dieu est présent.
3- L’accusation une blessure de communion
Il nous faut rappeler que l’accusation est une rupture de communion. Et dans le schéma originel de la faute, c’est une accusation en cascade, Adam accuse Eve, Eve accuse le serpent… perception du mensonge qui court sur pattes, et que Dieu fait alors ramper. L’accusation est une manière habile de ne pas se remettre en question et un certain dénigrement de l’autorité auquel on fait appel si cela va dans notre sens. Or la conversion est ce retour du fils prodigue dans un chemin intérieur qui reconnait d’abord sa dignité de fils et qui accepte l’autorité du Père. L’attitude de conversion est l’histoire de notre vie, toujours en mouvement, toujours à tendre vers cette union à Dieu à travers le désir qu’exprime mon âme. Une intelligence pratique de nos limites humaines. Elle demande une vigilance accrue sur les mouvements de notre cœur pour à chaque fois reposer un choix vers le Seigneur et confirmer ainsi notre fidélité. « L’homme fidèle reçoit la force de se confier entre les mains du Dieu fidèle »[v]C’est justement prendre le temps du repos pour arrêter ce mouvement pervers qui nous fait aller dans tous les sens, et de fait nous attire dans l’obscurité de nos ressources humaines. La vérité jaillit toujours à la lumière de la Parole dans notre vie et doit-nous faire prendre conscience de ce que nous avons à réaliser. L’isolement que nous vivons dans l’accusation nous aliène dans un rôle de justicier et empêche toute évolution durable. Ce qui est vrai dans notre relation spirituelle l’est aussi dans notre relation fraternelle. La fidélité à la Parole de Dieu, et la méditation de ces commandements nous aide à comprendre les changements que nous avons à réaliser et continuer de faire confiance en ce dessein de sagesse qu’il déploie tout au long de notre histoire et de l’histoire des hommes.
Nous avons à revoir notre relation à l’autre dans une optique de changement et non en termes d’exigence. L’orgueil de certaines positions qui refusent les conversions nécessaires pour s’ajuster à la Parole de Dieu, et la vanité d’autres positions se suffisant de soi-même et des œuvres de ses propres mains introduisent non une société liquide ou transparente mais à une vie de la cité illusoire voir diabolique. Une course chimérique d’un feu de paille, même si les apparentes flammes de vaines satisfactions passagères jaillissent avec vigueur. Le feu de paille se reconnait toujours dans l’incapacité à durer dans le temps. Il se reconnait paradoxalement dans cette course effrénée à des changements qui occultent les véritables questionnements pourtant prioritaires et conduisent au même essoufflement du sens. Cette course à l’illusion où les manifestations sont flamboyantes, mais si éphémères !
4 – La rigidité une forme d’auto-centrisme
Le temps du repos est celui du recul et de l’intégration de l’expérience dans notre vie pour nous questionner et nous orienter autrement. Refuser la conversion à travers la rigidité du cœur sclérose tous nos choix et rigidifie notre être, cultivant un entre soi où le prochain n’a plus sa place. Une insensibilité de tout notre être en excluant l’autre dans ce refus d’ouverture que nous prônions comme première approche afin de demander une oreille à sa propre idéologie (démarche souvent faite par les disciples de la culture de mort). La prière pour nous-mêmes et l’intercession de nos frères nous introduira à d’autres conversions à vivre, et à un renouvellement de la relation. Une prise de conscience que la conversion est un acte de vérité sur notre fidélité à l’autre et au Tout Autre. Un choix clair pour maintenir notre engagement et évoluer dans notre histoire en intégrant tout ce qui fait notre vie (et non dans le déni ou le refus de continuer). Revoir notre positionnement dans la foi, et continuer de nous laisser transformer par le Seigneur est savoir écouter la Parole et en même temps contempler l’œuvre de Dieu qui continue d’agir à tout instant pour ceux qui Lui sont fidèles. Une contemplation de l’action de Dieu qui amène à l’adoration. D’où l’importance de prendre le temps de la prière d’adoration, car elle nous fait entrer dans la joie de la création. Ce n’est pas seulement un dialogue avec Dieu mais aussi et d’abord une admiration de l’œuvre de Dieu. L’adoration c’est reconnaitre l’œuvre du Créateur par l’amour qu’il a mis à tout créer.
La vérité de l’amour n’est pas de se regarder soi-même de façon autocentrée… c’est ce qu’on entend dans les crises, ‘après tout ce que j’ai fait pour toi’… ce décentrement sur soi-même qui exclut l’autre. Bien au contraire, nous avons à regarder dans les yeux de l’autre notre propre réalité. « L’homme religieux est en chemin et doit être prêt à se laisser guider, à sortir de soi pour trouver le Dieu qui surprend toujours. »[vi]L’amour dans le don est ce lien d’humanité que nous développons dans une plus grande connaissance de notre dignité, dans les étonnements vécus par le décalage de nos perceptions spirituelles. L’apprentissage de l’amour est fondé à l’origine, par la dignité du sacrement du mariage et par cette connaissance de la grandeur de l’homme et de la femme, car nous rencontrons inéluctablement Dieu qui est à l’origine de tout. Lorsque nous vivons la communion dans le couple, nous vivons la communion avec Dieu parce que nous laissons la Parole du Seigneur agir dans notre vie, c’est là notre premier témoignage. Ce qui fait la valeur du don est notre participation libre à l’amour gratuit.Ainsi nous comprenons la dignité de la famille comme une réalité de l’amour partagé avec les enfants. Les protégeant de tout ce qui nous parait mauvais, nous donnons le meilleur de soi pour leur apprendre à leur tour à recevoir l’amour et à le partager dans ces choix libres orientés vers le bien. L’amour reçu des parents nous aide à percevoir l’amour de Dieu qui est premier dans notre vie, et qui peut se révéler de bien d’autres manières. « Les parents sont appelés, selon une parole de saint Augustin, non seulement à engendrer les enfants à la vie, mais aussi à les conduire à Dieu, afin que, par le Baptême, ils soient régénérés comme enfants de Dieu et reçoivent le don de la foi. Ainsi, avec la vie, leur sont données l’orientation fondamentale de leur existence et l’assurance d’un avenir conforme au bien[vii], orientation qui sera corroborée ultérieurement dans le sacrement de la Confirmation par le sceau de l’Esprit Saint »[viii]Une relation dans l’éducation qui demande un lien de confiance et en même temps le lieu de l’obéissance pour entrer dans sa propre autonomie. Souvent l’amour est vécu comme une indépendance, alors qu’il est l’expression d’une autonomie toujours plus grande, mais toujours liée à sa propre histoire.
5 – L’exigence de la fraternité
Nous avons à partager dans notre vie familiale, ou dans la vie de la cité, cet amour dans une recherche de fraternité où nous tissons les liens et nous essayons de faire ensemble sans nous isoler dans le précaire d’une relation virtuelle. « La convivialité est… une relation mutuelle fondée sur des échanges authentiques qui requièrent que l’on se décentre de soi-même pour écouter l’autre et aussi pour se livrer à lui »[ix]Dans les vacances, l’importance de l’échange relationnel est premier. Cela pose des questions très pratiques. Vivons-nous des vacances familiales ou bien nous débarrassons nous des enfants dans des centres de vacances ou d’autres occupations ? Savons-nous être attentifs à ce que font nos proches durant les vacances, et sommes-nous acteurs de la fraternité en recherchant un espace de rencontre pour eux ? La réalité de l’amour demande la vérité de nos actes dans une volonté de faire ce qui est en mon pouvoir pour vivre la charité, et la recherche d’une connaissance suffisante de ce que vit l’autre pour lui proposer un chemin d’humanité. « La rencontre avec le Christ — le fait de se laisser saisir et guider par son amour — élargit l’horizon de l’existence et lui donne une espérance solide qui ne déçoit pas »[x]Comme le Christ, nous sommes invités à marcher avec nos frères, et être attentifs aux soucis du bien commun, et l’omission est un péché comme nous le récitons à chaque début de messe. « Quand l’homme pense qu’en s’éloignant de Dieu il se trouvera lui-même, son existence échoue[xi]. Le commencement du salut est l’ouverture à quelque chose qui précède, à un don originaire qui affirme la vie et conserve dans l’existence. »[xii]Fonder notre vie sur le roc de la Parole et de la prière nous engage à vivre tous nos choix à la lumière de la foi afin de garder notre vocation première et de repérer les contresens pour discerner les choix à opérer. « en vous, [Seigneur], dans votre vérité (…) je serai ferme et stable »[xiii]
Une certaine frivolité dans nos relations humaines, et une distance au nom d’une prétendue bienséance est parfois une excuse pour nos propres lâchetés à nous engager. Etre attentif à l’autre est une exigence de la foi, et en même temps le fondement de toute relation humaine. Pour partager il faut être au moins deux. C’est une évidence à rappeler parfois, dans le tourbillon des activités. Les vacances sont justement pour restaurer le lien de manière gratuite et non subordonnée à une forme d’utilitarisme dévastateur. « La convivialité a encore plus d’importance pour les chrétiens… ils sont appelés à une vie en commun avec le Christ dans les échanges de la prière et à la table eucharistique »[xiv]Elle n’est pas une fin en soi, mais la convivialité pousse à ce témoignage en actualisant notre participation fructueuse au sein de la communauté ecclésiale. Ce qui demande d’abord une conversion personnelle qui ne soit pas superficielle mais interroge les valeurs que nous mettons en premier. Une évangélisation du temps, où l’autre a toute sa place, est n’est pas perçue comme une contrainte sociale. « En famille, la foi accompagne tous les âges de la vie, à commencer par l’enfance : les enfants apprennent à se confier à l’amour de leurs parents. C’est pourquoi, il est important que les parents cultivent en famille des pratiques communes de foi, qu’ils accompagnent la maturation de la foi de leurs enfants. »[xv] Savoir prendre le temps d’éduquer nos enfants, et d’être à leurs côtés dans la croissance, demande aussi de faire des choix et d’ orienter sa vie sur une hiérarchie des valeurs où je dois mettre la dignité humaine et le respect de la vie dans une écologie intégrale avant toute chose. Trouver du temps à passer en famille, en commençant par la personne avec qui j’ai contracté le sacrement du mariage, avec les enfants et sans oublier nos propres parents. Le premier partage que nous avons à vivre, avant même l’argent, est un partage du temps. Une gratuité de la relation où nous prenons soin les uns des autres pour ainsi grandir dans notre dignité humaine. Dans ces moments-là, nous ne sommes pas forcément utiles, mais cela a du sens.
6- L’amour du pardon comme lieu de rédemption
Nous avons à rechercher cet amour du pardon car il engage à une conversion sincère et restaure la relation durablement. « La foi affirme aussi la possibilité du pardon, qui bien des fois nécessite du temps, des efforts, de la patience et de l’engagement ; le pardon est possible si on découvre que le bien est toujours plus originaire et plus fort que le mal, que la parole par laquelle Dieu soutient notre vie est plus profonde que toutes nos négations »[xvi] Relire dans son cœur, et faire repentance, c’est accepter que l’amour de l’autre puisse me toucher, c’est accepter que je puisse lui redonner le don, c’est accepter de voir la misère de son cœur. Parfois nous laissons se scléroser des situations par manque de temps, et une organisation des priorités souvent poussées par l’instant présent. Une autre forme des vacances est justement de trouver l’espace pour élargir nos relations au cœur de Dieu et à la périphérie de notre humanité. Etendre nos cordages de l’amour demande de jeter nos filets dans la mer de l’amour pour vivre le pardon en sortant de nos filets tout ce qui détruit la relation et purifier notre fraternité dans un accueil de l’autre tel qu’il est et non tel que je voudrais qu’il soit. C’est le temps des visites retardées dans la complexité des relations fraternelles et des rencontres oubliées, notamment de nos aînés. Oui, c’est le temps de la vie où Dieu est premier, et où nous nous laissons conduire par sa main. C’est lui qui oriente toute notre existence qui lui donne sens. Par l’Esprit Saint il redresse tout ce qui est tordu, et nous appelle à réchauffer nos tiédeurs par la ferveur de notre piété. Il nous enracine dans une stabilité en nous donnant une parole éternelle et évite les dispersions du monde pour nous recentrer sur l’essentiel. Comme un chemin du pardon qui réintroduit à d’autres horizons où le visage de Dieu transparait toujours et où l’unité à nos frères en est le signe tangible. Cette gratuité de la relation qui se vit dans l’amour et qui participe à l’œuvre de toute la création. Car si tout acte communautaire à des incidences personnelles, tout acte personnel a aussi une incidence communautaire. Plus je vis d’amour, plus j’accueille le don, plus j’exerce le pardon, plus l’amour grandit autour de moi de façon attractive, dans un témoignage de vie indéniable. Cela demande beaucoup de mansuétude pour accueillir l’autre et faire taire nos propres colères.
7- Doux et humble de Coeur
Qu’est-ce que la mansuétude ? C’est l’inclination à rechercher la douceur dans ce que nous vivons, le courage d’être patient en toute chose avec ce regard de bienveillance et la force de savoir pardonner sans subordonner à la justice ou la rétribution. Dieu est doux, il ne s’impose pas dans notre vie mais se propose comme une joie à redécouvrir. Dieu est patient malgré nos propres errements, pour nous ramener sur le chemin de vie, malgré la répétition de nos échecs, la répétition de nos abandons. Il est là, vraiment là, toujours là. Dieu est l’amour qui se donne, et qui pardonne. « Croire signifie s’en remettre à un amour miséricordieux qui accueille toujours et pardonne, soutient et oriente l’existence, et qui se montre puissant dans sa capacité de redresser les déformations de notre histoire. La foi consiste dans la disponibilité à se laisser transformer toujours de nouveau par l’appel de Dieu.»[xvii]Oui, vivre la mansuétude de Dieu nous ouvre à la grâce de la foi dans l’accueil de la prodigalité de l’amour. Une conversion de tout notre être et une transformation de notre relation à Dieu et les conséquences de la nouveauté de sa présence dans la relation aux autres où tout à un sens nouveau. « La rencontre avec Dieu réveille ma conscience parce qu’elle …. devient capacité d’écoute du Bien lui-même. »[xviii]La sagesse est alors l’écoute de ce bien, et la contemplation de son œuvre. Il est bien vivant nous en témoignons.
L’incarnation du Christ est contemplation de l’espérance retrouvée, Dieu nous veut à ses côtés, il n’est pas là pour nous condamner mais d’abord et avant tout pour nous aimer, et dans la vérité de nos actes, Il respectera nos choix de nous séparer de Lui ou de mieux l’aimer. Tous les actes nous poussent dans une orientation de vie, mais aucun acte ne nous y enferme, jusqu’à la croix, notre acte comme le bon larron pourra être de reconnaitre le Sauveur, ou comme l’autre de le refuser. La sagesse nous permet de discerner les choix que nous devons suivre en conscience, et ceux que nous devons refuser au nom même de la dignité de la vie de foi. « Découverte de Dieu et découverte de soi vont de pair »[xix]La contemplation de la vie du Christ est une reconnaissance de la beauté de Dieu et de la dignité humaine. Oui nous sommes heureux lorsque nous marchons dans la liberté des Ecritures guidés par l’amour et sachant discerner dans l’esprit de vérité ce que nous avons à vivre. Plus d’angoisse, le Seigneur Jésus vient nous sauver définitivement. Chassons les peurs de notre vie Il est vivant. Accueillons-le dans notre vie non comme une idée, mais ouvrons-lui la porte de notre cœur pour le laisser entrer avec évidence.
L’enfantement est un don que nous recevons comme la réalité de l’amour qui prend chair. Un don qui se reçoit non comme un fardeau mais comme une grâce. Un don que nous nous approprions pour développer nos talents et accueillir la joie de la fécondité spirituelle. La conversion est alors cette reconnaissance de notre péché, et la résolution sincère et ferme de changer pour mieux marcher comme disciple du Christ. La conversion est d’ouvrir notre vie à la vie dans l’Esprit, lui qui vient nous rejoindre dans la transformation de notre cœur, au sanctuaire de la conscience pour nous inviter à nous laisser conduire par sa présence, sans s’imposer, mais toujours dans cette liberté d’enfant de Dieu reçu au baptême et qui nous rend dociles à son souffle. « Les efforts du cœur humain, les efforts de la conscience, grâce auxquels s’opère cette … conversion, sont le reflet du processus par lequel la réprobation est transformée en amour salvifique qui accepte de souffrir »[xx]Une liberté du don qui va jusqu’à s’offrir totalement, souffrir intégralement, parce que j’aime et que j’accepte que l’amour de l’autre ne soit pas adapté à mon amour.
Conclusion
Le temps du repos estival, c’est aussi celui de l’inutilité productive, pour le repos du corps, comme une répétition de notre place dans la société au temps de la retraite, où l’utilité sera d’abord et avant tout relationnelle, à travers un rythme qui donnera l’importance à d’autres choses souvent négligées jusque-là. Une forme de recentrement sur ce qui a le plus de sens. Mais pourquoi refusons-nous l’amour à travers le péché ? Pourquoi refusons-nous de vivre la communion et de chercher l’unité en toute chose ? L’illusion du péché est d’abord un clivage de notre vie. L’amour est exigeant car il demande du temps pour y puiser sa profondeur, le péché est éparpillement dans l’immédiateté des plaisirs, déstructuration de l’être et en fait germe de désespérance. « La réalité humaine, créée par le Verbe, trouve vraiment son plein accomplissement dans la foi obéissante de Marie. De l’Annonciation à la Pentecôte, elle se présente à nous comme la femme totalement disponible à la volonté de Dieu. »[xxi]Or la racine du péché est ce refus d’écouter la parole de Dieu, ce refus de confiance en son œuvre du salut qui passe par la purification des sens, ce refus d’entrer en dialogue avec Dieu se faisant son égal. La grâce se vit dans la liberté de l’amour qui demande l’obéissance et en même temps y accomplit le sens de la Parole d’alliance toujours fidèle. La grâce se comprend alors comme un lieu de rétablissement dans le don et d’ajustement de l’amour dans l’altérité
Justement dans ce temps de repos estival peut-être pourrons-nous réfléchir à une autre forme d’implication dans la liturgie de l’Eglise. Le sacrement de l’amour demande de s’accorder un temps de silence avant la messe pour écouter ce que le Seigneur nous demande de vivre. De même, il faut pratiquer le jeûne, au moins une heure avant la célébration eucharistique, comme nous le conseille la tradition de l’Eglise, pour se préparer physiquement à recevoir le Sauveur. Dans cette relation fraternelle a réinvestir, la communion demeure avant tout un engagement missionnaire pour porter l’amour du Christ dans la société. Le témoignage de notre vie demande une certaine cohérence qui ne doit pas être lié à un automatisme mais bien à une pratique qui se témoigne dans notre participation active dans l’Eglise, chacun selon ses talents. « En communiant au Corps et au Sang de Jésus Christ, nous sommes en effet rendus participants de la vie divine de façon toujours plus adulte et plus consciente. »[xxii]Il y a une maturité spirituelle à s’abreuver à la source de la vie. Laissons-nous saisir par sa présence, méditons sa Parole et témoignons de notre foi par la transformation de notre cœur et l’attente du retour du Christ dans la Gloire. « Toi qui sais tout et qui peux tout, toi qui sur terre nous nourris, conduis-nous au banquet du ciel et donne-nous ton héritage, en compagnie de tes saints. »[xxiii]
Père Greg BELLUT– Curé
Ensemble paroissial de Joinville le pont
[i]Qo 12,11
[ii]Grégoire de Nysse – Traité sur la perfection chrétienne
[iii]&53 Lumen Fidei
[iv]&22 Verbum Domini
[v]&10 Lumen Fidei
[vi]&35 lumen Fidei
[vii]Cf. De nuptiis et concupiscentia, I, 4, 5 : PL 44, 413 : « Habent quippe intentionem generandi regenerandos, ut qui ex eis saeculi filii nascuntur in Dei filios renascantur ».
[viii]&43 lumen Fidei
[ix]P 74 Communion XLIV,4 – petite théologie du grand age
[x]&53 Lumen Fidei
[xi](cf. Lc 15, 11-24)
[xii]&19 Lumen Fidei
[xiii]St Augustin XI, 30, 40 : PL 32, 825.
[xiv]P 74 Communion XLIV,4 – petite théologie du grand age
[xv]&53 Lumen Fidei
[xvi]&55 Lumen Fidei
[xvii]&13 Lumen Fidei
[xviii]&33 Spe Salvi
[xix]&31 Evangile de la vie
[xx]&45 Dominum et vivificantem
[xxi]&27 Verbum Domini
[xxii]&70 Sacramentum Caritas
[xxiii]Sequence du St Sacrement